Skip to main content
Communiqué de presse

Le bilinguisme influence les croyances des enfants

D’après une étude de Concordia, les enfants exposés à deux langues envisagent différemment l’acquis et l’inné

Montréal, le 13 janvier 2015 – La plupart des jeunes sont essentialistes : pour eux, les caractéristiques des humains et des animaux sont innées. Ce raisonnement peut les amener à penser que certains traits, tels que la langue maternelle et les préférences vestimentaires, sont déterminés dès la naissance plutôt qu’acquis en fonction du milieu environnant.

Or, selon une nouvelle étude de l’Université Concordia, certains enfants bilingues seraient mieux à même de comprendre que les attributs d’une personne proviennent de son apprentissage.

La recherche, à paraître dans la revue Developmental Science, suggère que le bilinguisme au préscolaire peut influencer profondément les croyances des enfants sur le monde qui les entoure. Ainsi, contrairement à leurs camarades unilingues, beaucoup de jeunes exposés à une seconde langue après l’âge de trois ans pensent que les particularités propres à une personne se forgent avec l’expérience.

L’étude a été réalisée par la professeure de psychologie Krista Byers‑Heinlein et la coauteure Bianca Garcia, étudiante de 1er cycle à Concordia. Celles-ci ont interrogé 48 enfants de cinq ou six ans qui ont appris soit une seule langue (unilinguisme), soit deux langues en même temps (bilinguisme simultané), soit deux langues l’une après l’autre (bilinguisme séquentiel).

Les chercheuses ont raconté aux enfants deux histoires : l’une sur des bébés nés de parents anglais, mais adoptés par des Italiens, et l’autre sur des canards élevés par des chiens. Elles leur ont ensuite demandé si, en grandissant, les bébés allaient parler anglais ou italien, et si les canetons feraient coin-coin ou aboieraient. Les enfants devaient par ailleurs préciser si les canetons auraient des plumes ou des poils.

« Nous avions prédit que les enfants ayant appris une langue à la fois (bilinguisme séquentiel) arriveraient mieux à comprendre, grâce à leur propre expérience d’apprentissage, qu’une langue est une compétence qui s’acquiert. Nous pensions également que tous les enfants considéreraient comme innées d’autres caractéristiques, tels le cri et le physique des animaux », explique Krista Byers‑Heinlein, qui est aussi membre du Centre de Recherche en Développement Humain.

Les résultats l’ont surprise. Les enfants ayant appris une langue à la fois (bilinguisme séquentiel) se sont effectivement avérés moins essentialistes concernant l’idiome – ils savaient qu’un enfant éduqué par des Italiens parlerait italien. Mais ils avaient aussi fortement tendance à penser que le cri et le physique d’un animal sont acquis avec l’expérience. En d’autres termes, un canard élevé par des chiens aboierait et courrait plutôt que de faire coin-coin et de voler.

« Les deux catégories d’enfants – unilingues et bilingues − ont fait des erreurs, mais de différents types. Les unilingues pensaient généralement que tout est inné, tandis que les bilingues croyaient davantage que tout est appris », poursuit la professeure Byers‑Heinlein. 

« Les erreurs systématiques des enfants présentent un réel intérêt pour les psychologues, car elles aident à comprendre le processus de développement. Nos résultats montrent clairement que l’expérience acquise au jour le jour dans un domaine – comme l’apprentissage d’une langue – peut altérer les croyances d’un enfant sur une grande variété de sujets, réduisant ainsi son penchant essentialiste. »

L’étude s’avère par ailleurs importante d’un point de vue social, puisque les adultes ayant des croyances essentialistes fortement ancrées ont tendance à adopter un comportement axé sur les stéréotypes et les préjugés.

« Grâce à notre découverte, selon laquelle le bilinguisme atténue les croyances essentialistes, nous sommes portés à croire que l’apprentissage d’une seconde langue durant l’enfance pourrait favoriser l’acceptation de la diversité sociale et physique chez les humains », conclut la chercheuse.


Source




Retour en haut de page

© Université Concordia