Les Irlandais au Québec
Un bref aperçu |
Les racines des Irlandais au Québec sont vastes et profondes et c'est pourquoi il est difficile de brosser un tableau précis du rôle prépondérant qu'ils ont joué dans le développement de la plupart des régions de la province. La relation entre les Français et les Irlandais au Québec prend source au sein des armées de France dans lesquelles bon nombre de chefs et de soldats irlandais en exil ont servi, y formant souvent des régiments distincts. En raison du grand nombre d'Irlandais en France au 16e siècle, le Collège irlandais vit le jour à Paris en 1578 pour assurer l'éducation des enfants d'exilés irlandais qui se voyaient refuser une éducation catholique par les autorités britanniques en Irlande. Le Collège sert encore aujourd'hui à la tenue d'évènements culturels et diplomatiques irlandais. Bon nombre de soldats irlandais combattant au sein des forces francaises en Nouvelle-France cachaient leur identité aux forces britanniques en changeant leur nom pour un patronyme à consonnance française. C'est la raison pour laquelle un grand nombre de noms supposément francais au Québec ne trouvent pas écho en France. À la fin des années 1600, on estime que 130 des 2 500 familles installées en Nouvelle-France, soit environ 5 %, étaient composées d'Irlandais. En 1871, après une vague d'immigration massive, leur proportion atteignait 10 %, faisant des Irlandais le deuxième groupe en importance au Canada après les Français. De 1816 à 1860, on estime que plus de un million d'immigrants, dont 60 % étaient Irlandais, sont entrés au pays par les ports de Québec et de Montréal. Au cours de la triste année de 1847, quelque 17 477 immigrants à destination de Québec sont décédés; il s'agissait pour la plupart d'Irlandais. De ce nombre, 3 879 ont trouvé une sépulture à Grosse-Île, alors qu'environ 5 000 sont enterrés près des hangars de Pointe Saint-Charles à Montréal. Heureusement, cette tragédie s'est dénouée sur une note moins triste. Des centaines d'orphelins aussi bien à Québec qu'à Montréal ont été adoptés par des familles francophones qui leur ont permis de conserver leur nom irlandais. Faits saillantsAprès s'être installé à Québec, le docteur Timothy O'Sullivan, né à Cork, a pris le nom de Timothée Sylvain; il était le père de Marguerite d'Youville, la fondatrice des Soeurs grises en 1737. Le gouverneur Guy Carleton (Lord Dorchester), né à Strabane, en Irlande, a occupé le poste de gouverneur du Québec et a recommandé l'adoption de l'Acte de Québec en 1774, garantissant ainsi les droits religieux et le droit à l'instruction des francophones. Lewis Thomas Drummond, né à Derry, en Irlande, est devenu un avocat québécois de grande notoriété et a été un homme politique réformateur qui s'est porté à la défense des Patriotes de 1837. Il a occupé le poste de procureur général au sein de divers gouvernements pour ensuite devenir juge. Le docteur Edmund Bailey O'Callaghan, avocat, né à Cork, était un défenseur des droits des francophones dans le cadre de ce qui a mené à la rébellion de 1837, ce qui l'a forcé à fuir aux États-Unis en compagnie de Louis-Joseph Papineau. Davis Ross McCord, fondateur du Musée McCord, est issu d'une illustre famille originaire de Dublin. Au cours de la période qui a mené à la Confédération, Robert Baldwin, Francis Hincks et D'Arcy McGee, trois hommes politiques de descendance irlandaise, ont collaboré avec des hommes politiques du Québec, Louis-Hippolyte Lafontaine, Augustin-Norbert Morin et Georges-Étienne Cartier respectivement, à défendre les droits des Canadiens français dans le nouveau pays. Louis Riel, celui qui a permis au Manitoba d'obtenir le statut de province et qui fut accusé de trahison et pendu pour avoir instauré un gouvernement provisoire en Saskatchewan, était le descendant de Jack Reilly, un natif de Limerick qui avait changé son nom à Jean-Baptiste Riel au moment de son mariage à Boucherville en 1704. L'honorable Charles Fitzpatrick était l'avocat qui a défendu Louis Riel en 1885 et Honoré Mercier en 1892. Il a été membre aussi bien de l'Assemblée nationale du Québec que du Parlement canadien, et a été nommé juge en chef du Canada et lieutenant-gouverneur du Quebec. L'honorable Charles J. Doherty a été juge à la Cour supérieure du Québec de 1891 à 1906. Élu au Parlement pour la première fois en 1908, il a occupé le poste de ministre de la Justice pendant dix ans et, à ce titre, il a signé le traité de Versailles pour le Canada en 1919. Il a représenté ce pays à la Société des Nations et a contribué à la constitution de la Cour internationale de justice. Il a agi comme conseiller auprès du juge en chef de l'Irlande dans le cadre de la rédaction de la constitution de la République d'Irlande. Son petit-fils, l'honorable Charles Doherty Gonthier, siège actuellement comme juge à la Cour suprême du Canada. L'honorable Edmund James Flynn a enseigné à l'Université Laval pendant plus de 40 ans. Il a occupé le poste de ministre dans bon nombre de gouvernements du Québec et a été premier ministre de la province en 1896 et 1897. Au cours du 19e siècle, la ville de Montréal a compté six maires irlandais soit : William Workman, Francis Cassidy, le docteur William Hingston, James McShane, Richard Wilson-Smith et l'honorable James Guérin. De 1849 à 1980, 32 juges irlandais ont siégé à la Cour supérieure du Québec. Entre 1867 et 1973, 44 députés fédéraux irlandais ont été élus dans différents comtés au Québec alors que de 1867 à 1978 non moins de 57 Irlandais ont été membres de l'Assemblée nationale du Québec à titre de représentants de différentes régions de la province. Bon nombre d'hommes politiques ont entrepris leur carrière au niveau municipal et certains se sont hissés au rang de maire. Parmi ceux-ci on compte Francis Byrne (Charlesbourg), Xavier Kennedy (Douglastown), Charles Kirkland (Saint-Pierre), Charles McLary (Clifton), Dennis James O'Connor (Huntingdon), George O'Reilly (Verdun) et Charles Alleyn et Owen Murphy (tous deux à Québec). Les parents de Catherine Broderick, la mère du très honorable Louis Saint-Laurent, étaient originaires d'Irlande. Après avoir été ministre fédéral de la Justice et ministre fédéral des Affaires étrangères, ce dernier a été élu premier ministre du Canada en 1948 pour ensuire être réélu en 1949 et 1953. Georges Vanier, fils de l'Irlandaise Margaret Maloney, a connu une brillante carrière militaire et diplomatique avant de devenir le premier Canadien d'origine à occuper le poste de Gouverneur général en 1959. Héritant son intérêt pour la politique de ses grands-parents irlandais, l'honorable Daniel Johnson a été premier ministre de la province de Québec de 1966 à 1968. Deux de ses fils, Pierre-Marc et Daniel, ont également été premier ministre du Québec dans deux gouvernements différents. Claude Ryan, Louis O'Neill, Brian Mulroney et Jean Charest comptent parmi les hommes politiques québécois d'envergure dont les ancêtres sont irlandais. Des ingénieurs et des travailleurs irlandais ont joué un rôle prépondérant dans la construction du canal Lachine (1821-1825), du canal de Beauharnois (1843), du Grand Trunk Railway (1852) et du pont Victoria (1854-1859). La constitution de la Banque d'êpargne de la Cité et du District de Montréal (maintenant la Banque Laurentienne) est le fruit d'efforts communs de Français et d'Irlandais. Parmi les personnes recrutées par l'évêque Ignace Forget pour servir de mécènes de la banque, on retrouve d'une part, Morin, Lafontaine, Papineau et Cartier, et d'autre part, Hincks, Drummond, Curran, O'Brien et Workman. Parmi les présidents de la banque : Henry Mulholland, l'honorable Edward Murphy, Sir William Hingston et Dr Donald A. Hingston. La basilique St. Patrick, l'hôpital St. Marys, le Centre d'accueil Father Dowd et le Collège Loyola comptent parmi les institutions que les Irlandais ont aidé à créer à Montréal. Le manoir Shaughnessy, donné pour servir de premier emplacement pour l'hôpital St. Mary's, est maintenant la pièce maîtresse du Centre canadien d'architecture. Les Montreal Shamrocks ont remporté la Coupe Stanley en 1899 et 1900 alors que les Canadiens de Montréal ont été fondés en 1910 par Ambrose O'Brien. Pendant la première décennie de l'existence de cette équipe, George Kennedy en était l'entraîneur et le directeur; cette équipe a remporté la coupe Stanley en 1910. Joe Malone, né à Québec, a joué pendant sept ans pour les Bulldogs de Québec et a mené cette équipe à la conquête de deux coupes Stanley en 1912 et 1913. James O'Donnell, né à Wexford, en Irlande, est l'architecte qui a conçu la basilique Notre-Dame de Montréal sous le plancher de laquelle d'ailleurs il est enterré. Il a consacré cinq années de sa vie à la supervision de la construction de cet édifice. La Bolduc (Mary Travers), plus grande chansonnière du Québec, et Émile Nelligan, poète canadien français de renom, étaient moitié Irlandais, moitié Français et leur art a été enrichi par les deux cultures. Le légendaire violonneux, Ti-Jean Carignan, a su incorporer les traditions et les techniques musicales irlandaises à sa musique, donnant à la musique québécoise sa sonorité unique. |