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Antibiotiques et E. coli : des chercheurs de Concordia publient une étude aux importantes retombées pour la santé publique

Un professeur de biochimie et deux étudiantes du 1er cycle cosignent un article sur une nouvelle technique d’évaluation de la résistance aux médicaments
4 janvier 2019
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Brandon Findlay : « En faisant la lumière sur les facteurs qui régissent les mutations subies par les bactéries quand leur survie est en jeu, nous pourrons concevoir des médicaments qui conservent leur efficacité plus longtemps. »
Brandon Findlay : « En faisant la lumière sur les facteurs qui régissent les mutations subies par les bactéries quand leur survie est en jeu, nous pourrons concevoir des médicaments qui conservent leur efficacité plus longtemps. »

La résistance bactérienne aux antibiotiques constitue une menace importante pour la santé dans le monde. Selon un rapport de la Commission Lancet sur les maladies infectieuses publié en 2013, aux États-Unis seulement, le phénomène d’antibiorésistance est responsable de quelque 23 000 morts chaque année. Un groupe d’experts du Royaume-Uni (voir Review on Antimicrobial Resistance) estime qu’en 2050, le taux de mortalité dans le monde aura atteint les 10 millions par année, si aucune mesure n’est prise d’ici là.

Toutefois, une recherche menée par Brandon Findlay, professeur adjoint au Département de chimie et de biochimie de la Faculté des arts et des sciences de l’Université Concordia, pourrait signifier l’amorce de profonds changements dans la façon dont la puissance des antibiotiques actuels est évaluée, de même que celle dont les nouveaux agents sont éprouvés au moyen d’E. coli. Les résultats ont également des implications pour d’autres bactéries.

Le compte rendu de l’étude, cosigné par Nour Ghaddar et Mona Hashemidahaj – toutes deux étudiantes au premier cycle, a été publié en libre accès le mois dernier dans la revue Scientific Reports. Leur article fait état d’avancées importantes en ce qui a trait aux antibiogrammes, épreuves permettant d’établir le degré de sensibilité des bactéries aux antibiotiques.

Un portrait plus clair du processus d’apparition de la résistance chez E. coli

L’équipe de Concordia a conçu une chambre d’évolution bactérienne, soit un dispositif économique constitué de plaques SAGE (pour Soft Agar Gradient Evolution) – et s’en est servi pour cultiver des souches d’E. coli résistantes à toutes les principales classes d’antibiotiques.

« Le principe de la plaque SAGE repose principalement sur l’utilisation d’une gelée semi-liquide riche en nutriments dans lequel peut se développer E. coli. Le piège, toutefois, est que le milieu de culture contient un antibiotique dont la concentration varie selon un gradient déterminé », explique Nour Ghaddar, titulaire depuis peu d’un baccalauréat ès sciences avec Honours en biochimie.

« Cette technique imite la manière dont fonctionnent les antibiotiques dans le corps humain. Alors que les bactéries nagent à la recherche de nutriments, elles se butent à des concentrations de plus en plus fortes d’antibiotique, ce qui les force à développer des mutations afin de pouvoir survivre. »

On teste le plus souvent l’efficacité des antibiotiques au moyen de boîtes de Petri. On introduit par inoculation des bactéries dans le milieu de culture contenant l’agent antibactérien visé, on compte les micro-organismes survivants, puis, après quelques calculs complexes, on estime si la résistance évoluera au cours du traitement.

« Notre méthode – qui fait appel à des plaques SAGE – donne un portrait plus clair du processus d’apparition de la résistance chez E. coli, précise Nour Ghaddar. Par conséquent, elle permet de mieux nous guider quant à la façon de prescrire un antibiotique et d’en tester l’efficacité, ainsi que de mettre au point de nouveaux traitements antimicrobiens. »

Cette technique nous permet également de déterminer si la résistance apparaîtra rapidement ou lentement. Or, il est important d’avoir en main cet élément d’information quand vient le temps de choisir un antibiotique et de déterminer la durée du traitement.

« En faisant la lumière sur les facteurs qui régissent les mutations subies par les bactéries quand leur survie est en jeu, nous pourrons concevoir des médicaments qui conservent leur efficacité plus longtemps, fait remarquer Brandon Findlay. Au bout du compte, cela pourrait signifier de meilleurs taux de réussite du traitement pour les patients. »

Faire passer la science du laboratoire à la salle de classe

Outre de corroborer la fiabilité du système SAGE, les résultats dont fait état l’article inciteront d’autres chercheurs à mener des expériences similaires. Vu le faible coût de cette méthode, n’importe qui possédant une expérience de la culture des bactéries peut bâtir sa propre chambre d’évolution bactérienne à partir de matériel utilisé quotidiennement dans les laboratoires.

Brandon Findlay s’est inspiré de l’équipement utilisé à l’Université du Texas, à Austin. Toutefois, en se renseignant sur la manière de construire une installation similaire, il s’est vite rendu compte que ce serait inabordable et que cela prendrait beaucoup de temps. Or, en se servant de composantes plus rudimentaires, il a réussi à créer le système de plaques SAGE.

« La technique est simple – j’imagine facilement des étudiants du secondaire ou du cégep pouvoir mener des expériences semblables, souligne Brandon Findlay. Faire passer la science du laboratoire à la salle de classe peut contribuer à démystifier notre travail et, qui sait, à inspirer la prochaine génération de chercheurs et chercheuses. »

Une expérience pratique dans un milieu non compétitif

Nour Ghaddar et Mona Hashemidahaj considèrent toutes deux cette expérience de recherche comme une occasion unique de mettre en pratique ce qu’elles ont appris.

« Ça a été une aventure formidable et très intense », affirme Mona Hashemidahaj, qui a récemment obtenu son baccalauréat ès sciences avec spécialisation en biologie cellulaire et moléculaire. « J’en suis ressortie non seulement avec plus d’expérience, mais aussi armée d’une plus grande confiance en moi – sans compter que je peux maintenant dire que je suis coauteure d’un article publié! »

Nour Ghaddar, qui a participé au projet dans le cadre du programme de bourses de recherche pour les étudiants de 1er cycle de l’Université Concordia, dit s’être sentie encouragée et soutenue par ses professeurs et camarades étudiants.

« On encourage vraiment les étudiantes et étudiants du 1er cycle à travailler et à amorcer des projets comme bénévoles dans les laboratoires de recherche, et j’en suis ravie, ajoute-t-elle. Les professeurs sont toujours disponibles pour guider et aider les étudiants. De plus, j’aime l’atmosphère non compétitive qui règne dans l’équipe – nous nous entraidons tous et discutons de nos découvertes en groupe. »

Selon Brandon Findlay, il est rare que des étudiants aient la chance de corédiger ce genre d’article si tôt dans leur parcours de formation postsecondaire.

« C’est inhabituel pour un étudiant du 1er cycle de figurer parmi les auteurs d’un article. Alors, imaginez deux étudiantes – à titre d’auteures principales, en plus. C’est un véritable hommage aux compétences de Nour et de Mona. »


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Département de chimie et de biochimie ainsi que sur le Département de biologie de l’Université Concordia.

 



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