La Galerie Leonard-et-Bina-Ellen réexamine l’œuvre d’Anne Savage
Un nouveau projet Web de la Galerie Leonard-et-Bina-Ellen examine de plus près l’œuvre de la peintre paysagiste montréalaise Anne Savage (1896-1971).
Conçu par l’ancienne conservatrice de recherche Max-Stern Katrie Chagnon et l’historienne de l’art Elizabeth Otto, le projet Anne Savage : L’« impensé » d’une collection sera lancé le 28 mai prochain.
Artiste et professeure d’art, Anne Savage a été l’une des membres fondatrices du Groupe des peintres canadiens. En outre, elle a pendant un certain temps été membre du groupe de Beaver Hall.
Elle entretenait par ailleurs des liens étroits avec l’Université Concordia : en tant que professeure, elle a enseigné l’art aux deux cofondateurs de la Faculté des beaux-arts – Leah Sherman et Alfred Pinsky.
De plus, le fonds Anne Savage, qui représente la plus grande collection d’œuvres de cette artiste à un même endroit, est conservé à la Galerie Ellen. Constitué d’esquisses, de dessins et de panneaux peints que Concordia a acquis par dons successifs de 1963 à 2001, il représente l’ensemble monographique le plus substantiel de la galerie.
Un réexamen critique
Selon Katrie Chagnon, Elisabeth Otto et elle ont abordé la collection d’esquisses et de documents d’Anne Savage sous un angle féministe et décolonialiste.
« Ces œuvres présentent une imagerie des plus intéressantes. Des questions problématiques y sont également exposées », souligne Katrie Chagnon.
« Nous nous sommes attachées à mettre en lumière toute la complexité de ce corpus et de la façon dont cette artiste est intervenue dans les différentes structures sociales, culturelles et politiques de l’époque. »
La Galerie Ellen a exposé l’œuvre d’Anne Savage à de nombreuses reprises depuis la fin des années 1960, mais ce projet marque une première démarche de regard critique sur cette artiste à l’Université.
« L’héritage d’Anne Savage a été largement célébré à Concordia, mais n’a jamais fait l’objet d’un examen critique à la lumière d’enjeux contemporains, explique-t-elle. Dans les expositions antérieures, la perspective était plutôt biographique, alors nous avons voulu adopter une approche différente. »
L’exposition comporte des textes signés Katrie Chagnon et Elizabeth Otto sur quatre modes d’intervention auxquels se consacrait Anne Savage : « dépeindre », « voyager », « imaginer » et « transmettre ».
L’accessibilité Web
Katrie Chagnon a trouvé les carnets de dessins de l’artiste particulièrement fascinants.
« Ces cahiers n’ont jamais vraiment été montrés, car les œuvres qu’ils contiennent sont considérées comme étant d’importance secondaire. Néanmoins, elles en disent long sur la façon de l’artiste d’envisager la création et la pratique artistique et sur son rapport avec la nature », remarque-t-elle.
« Il était intéressant, en contexte universitaire, de prendre en compte les œuvres considérées comme inachevées ou relevant du processus de création. »
Le projet Web porte aussi sur le temps qu’Anne Savage a passé à voyager en tant que membre d’un groupe qui avait été envoyé dans les communautés autochtones de la côte Ouest pour peindre et dessiner leurs artefacts et modes de vie.
« Nous avons tenté de comprendre non seulement la position problématique de l’époque à l’égard de culture autochtone, mais aussi ce qu’un artiste peut révéler au sujet de ce contact », affirme Katrie Chagnon.
Elle note que les relations d’Anne Savage avec plusieurs établissements influents de l’époque, comme le Musée des beaux-arts du Canada, lui ont permis de jouer un rôle déterminant dans la façon dont les institutions et le gouvernement du Canada ont utilisé l’art pour promouvoir des idéologies nationales.
« Nous voulions cerner son point de vue personnel à ce sujet. Elle demeurait ambiguë dans sa manière de se positionner par rapport à ces idéologies si puissantes dans les années 1920. »
Selon Katrie Chagnon, le fait que le projet soit en ligne permettra aussi aux visiteurs du site Web de s’intéresser de plus près aux œuvres d’Anne Savage.
Dans une exposition classique, les carnets de dessins d’Anne Savage auraient été présentés sous vitrine, ouverts à une page précise. Or, leur affichage en ligne permet aux visiteurs de les survoler numériquement, les rendant ainsi plus accessibles.
Les visiteurs peuvent établir des liens entre différents éléments de l’œuvre « qu’il aurait été impossible d’observer dans un espace physique », conclut Katrie Chagnon.
Consultez le projet Anne Savage : L’« impensé » d’une collection sur le site Web de la Galerie Leonard-et-Bina-Ellen dès le 28 mai.