Une enquête conjointe de Concordia pousse le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal à adopter des mesures pour réduire les concentrations de plomb
En réaction à une enquête menée conjointement par l’Institut du journalisme d’enquête de l’Université Concordia, Le Devoir et Global News, le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal ont annoncé un plan pour réduire les concentrations de plomb dans l’eau potable de la province.
« Neuf heures après la publication de nos premiers rapports le 16 octobre, le premier ministre du Québec François Legault annonçait la révision du règlement sur lequel portait notre enquête collective. Après la publication d’une autre série de rapports le 23 octobre, la mairesse de Montréal Valérie Plante a promis que la Ville adopterait des pratiques internationalement reconnues afin de protéger la santé de la population, explique Patti Sonntag (B.A. 2000), directrice de l’Institut.
Cela prouve que notre nouveau modèle de journalisme – axé sur la collaboration entre les programmes universitaires et les médias – sert l’intérêt public à une époque où les salles de presse subissent des compressions et où la méfiance envers les médias s’accentue. »
À sa sortie d’une réunion du cabinet tenue peu après la diffusion des résultats de l’enquête par Le Devoir et Global News, M. Legault a déclaré aux membres de la presse que le gouvernement allait modifier sa façon de mesurer les concentrations de plomb dans l’eau potable. Il a ajouté que Danielle McCann, ministre de la Santé du Québec, veillerait à ce que toutes les municipalités suivent les recommandations de Santé Canada.
Le Québec est la seule province où il est autorisé de laisser couler l’eau pendant cinq minutes avant de prélever des échantillons; cette méthode ne permet pas de mesurer avec précision l’exposition des résidents au plomb, selon les experts rencontrés lors de l’enquête conjointe.
La limite actuelle permise au Québec est de 10 parties par million (ppm), soit le double de la limite de 5 ppm recommandée par le gouvernement du Canada.
Des changements seront apportés à ces deux politiques en mars 2020.
À Montréal, les études et les rapports révèlent que 300 000 personnes pourraient être exposées à des concentrations trop élevées de plomb dans l’eau potable.
Le 23 octobre, des reportages dans Le Devoir et à Global News ont poussé la mairesse de Montréal Valérie Plante à prendre des mesures.
Dans une déclaration faite le jour même, Mme Plante a annoncé la création d’un plan, assorti d’une enveloppe de 557 millions de dollars, pour éliminer le plomb des canalisations d’eau potable de la ville.
Outre la mise en place de mesures pour accélérer le repérage des canalisations en plomb de la ville, le plan prévoit le remplacement de ces canalisations d’ici 2030. Et puisque les canalisations municipales sont reliées aux résidences, les propriétaires devront remplacer leurs tuyaux de raccordement, avec l’aide financière de la Ville.
L’enquête a été coordonnée par l’Institut de journalisme d’enquête de la Faculté des arts et des sciences de l’Université Concordia. L’équipe, qui regroupait 24 étudiants et journalistes de l’Institut, du quotidien Le Devoir et de Global News, a analysé l’eau de résidences dans cinq villes du Québec. Quatre-vingt-quatre familles ont volontairement pris part à cette initiative entre citoyens et scientifiques.
L’équipe a ensuite comparé ses résultats avec les données municipales, obtenues en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.
« Le travail incroyable effectué par l’Institut du journalisme d’enquête traduit bien l’engagement de notre faculté envers l’apprentissage expérientiel donnant lieu à des changements concrets, affirme André Roy, doyen de la Faculté des arts et des sciences
Avec l’aide d’experts au sein de la communauté, nos étudiants ont travaillé d’arrache-pied pour mettre au jour un problème grave de santé publique. Voilà un bel exemple de l’enseignement nouvelle génération. »
Les reportages se poursuivent. Se sont ajoutées récemment au consortium l’Université des Premières Nations du Canada et l’Université du Québec à Montréal. Karyn Pugliese, de la faculté de journalisme de l’Université Ryerson, s’est jointe au cercle de conseillers du collectif, et Martha Troian y agit comme productrice.
Un nouveau modèle de journalisme
Lea Sabbah, étudiante de premier cycle au Département de journalisme et membre de l’Institut, estime que sa participation à un projet d’une telle envergure lui a donné un aperçu de l’avenir du journalisme.
« Cette expérience m’a appris que le journalisme mettra de plus en plus l’accent sur les projets avant-gardistes de collaboration comme celui-ci, explique-t-elle.
Je ne m’attendais pas à ce que le changement de politique survienne aussi rapidement. Je suis très fière d’avoir pris part à cet effort d’équipe, et j’ai hâte de voir les autres changements que l’enquête provoquera. »
David Secko, directeur du Département de journalisme, est ravi de l’élan que l’enquête donne à l’Institut.
« La mission de notre département consiste à offrir des expériences immersives et pertinentes qui donnent à nos étudiants une longueur d’avance. Les réactions que nous observons ces jours-ci prouvent aux étudiants que leur travail porte ses fruits. »
À propos de l’Institut du journalisme d’enquête
Créé en juin 2018, l’Institut du journalisme d’enquête est le premier du genre au Canada. Il relie les principaux médias d’information aux étudiants et professeurs d’écoles de journalisme partout au pays afin de mener des enquêtes d’envergure nationale et d’intérêt public.
Ces activités revêtent une importance particulière pour les collectivités canadiennes qui n’ont pas les ressources nécessaires pour mener des enquêtes d’envergure. Patti Sonntag, directrice de l’Institut, a été rédactrice en chef au service des informations du New York Times. Elle est la première journaliste en résidence de l’Université Concordia.
Lisez les reportages du Devoir et de Global News. Renseignez-vous sur l’Institut du journalisme d’enquête.