Des bénévoles de la communauté de Concordia confectionnent 2 500 masques pour le personnel soignant
Professeure d’études cinématographiques, Haidee Wasson n’avait pas touché à la couture depuis 35 ans. Tout cela a changé quand elle a su que Barbara Layne, codirectrice de la grappe sur les textiles et la matérialité à l’Institut Milieux de l’Université Concordia, était à la recherche de bénévoles pour coudre des centaines de masques destinés au personnel soignant.
« Quand les campus de Concordia ont fermé et que tout le monde s’est mis à faire du télétravail, la réalité de la pandémie s’est immédiatement imposée. J’étais submergée par le besoin de faire ma part dans cette lutte », confie Haidee Wasson. « En voyant les images des travailleuses et travailleurs sur la ligne de front et en lisant les reportages sur la pénurie de matériel de protection individuelle, il était clair pour moi que c’était une bonne façon de leur venir en aide. »
Pour Barbara Layne, qui est aussi professeure de fibres et pratiques matérielles à la Faculté des beaux-arts, la motivation de réaliser ce projet est venue de diverses sources.
« Quand le recteur de Concordia Graham Carr a lancé aux laboratoires, aux chercheurs et aux autres experts un appel à contribuer aux efforts du secteur de la santé publique dans la lutte contre la COVID-19, je me suis sentie interpellée », explique-t-elle.
La Pre Layne avait en outre entendu dire que l’Université serait peut-être en mesure de faire don de plusieurs centaines de masques N95, si elle pouvait trouver une solution de rechange adéquate pour combler ses besoins sur le campus.
Enfin, à titre de spécialiste des textiles et des pratiques matérielles, elle pensait bien pouvoir imaginer et offrir un moyen de protection efficace et confortable.
« Les masques qui se fixent au visage au moyen de bandes élastiques derrière les oreilles peuvent devenir très irritants pour la peau – c’est un problème pour celles et ceux qui doivent les porter pendant des heures tous les jours. »
Quand la santé et la sécurité s’allient au design
Pour l’aider à relever ce défi et en arriver à un design apte à répondre aux exigences du secteur de la santé, on propose à Barbara Layne de rencontrer Frederic Guilhem Ducleon, directeur par intérim du Service – Environnement, santé et sécurité (SESS), à Concordia.
« Évaluer des produits et leurs caractéristiques de sécurité fait bien sûr partie de mon travail, mais cette initiative me tenait particulièrement à cœur. J’en ai fait un projet personnel et je m’y suis consacré en dehors de mes heures normales de travail », note M. Guilhem Ducleon.
Barbara Layne et lui ont commencé à s’échanger des idées de design à distance, chacun y consacrant des heures de recherche. Puis, toujours en respectant les mesures de distanciation, ils ont passé en revue des prototypes matériels conçus par la Pre Layne. Enfin, ils sont allés chercher une seconde opinion auprès de Catherine Lounsbury, médecin au Service de santé de Concordia.
« Elle et Frederic ont examiné minutieusement chaque prototype, à la recherche de petits trous laissant filtrer la lumière, s’assurant que le tissu était bien tendu et s’ajustait correctement sur le visage », explique Barbara Layne.
Parmi les excellentes idées proposées par la Pre Layne, Frederic Guilhem Ducleon souligne celle d’ajouter une minuscule poche au-dessus de la région nasale où il est possible de glisser un fil de métal souple. « Cela permet un meilleur ajustement, mais il demeure possible de retirer le fil pour bien laver le masque. »
Il considère la conception du masque d’une telle qualité, et le tissu si bien adapté à la tâche, que certains des masques pourraient en effet remplacer ceux de norme N95 que Concordia conserve en cas d’urgence. Le SESS sera ainsi en mesure d’ajouter plus de 1 000 de ces masques à ceux en tissu – confectionnés par la Pre Layne et ses bénévoles – destinés au personnel soignant.
Recherche de matériaux et financement de l’achat
En plus d’accepter une quantité de masques faits main en échange de masques N95, le SESS a été en mesure de financer l’achat de tous les tissus, fils et rubans en biais nécessaires à la confection des nouveaux masques, permettant du coup à Barbara Layne de surmonter l’obstacle financier que représentait l’acquisition du matériel.
« Encore là, cela n’a pas été une mince tâche de trouver du tissu, un grand nombre d’entreprises étant fermées à cause de la pandémie, souligne Barbara Layne. Nous sommes reconnaissants à Télio Fashion Fabrics et à BSP Prestige de nous avoir vendu les matériaux dont nous avions besoin, et ce, au prix coûtant ou moins cher encore. »
Elle note qu’un grand nombre de personnes confectionnent des masques pour le personnel soignant qui lutte contre la pandémie.La Pre Layne espère que chaque masque contribuera à rappeler à celles et ceux qui sont sur la ligne de front que beaucoup de gens pensent à eux.
« On doit compter 30 minutes pour produire un masque. Chacun est réalisé à la main avec soin et dévouement par une personne bénévole ».
Des couturières et couturiers de tous les horizons
Vingt-six bénévoles au total fabriquent des masques à la maison selon le design de l’Institut Milieux dans le but d’offrir une protection au personnel soignant qui lutte quotidiennement contre la pandémie. Lauren Osmond a accepté volontiers de se pencher sur sa machine à coudre, une fois sa journée normale de travail terminée.
« Je suis heureuse de pouvoir donner de mon temps à la collectivité. Je ne me rends pas souvent à Montréal pour contribuer sur place aux activités de l’Institut Milieux. C’est pourquoi reprendre contact avec l’institut par l’entremise d’un projet si porteur me procure une grande satisfaction. »
Étudiante au Département de design et d’arts numériques de Concordia, Marie‑Christine Larivière fait également partie des bénévoles. Elle se spécialise dans la conception de costumes et de chapeaux, ses créations étant plutôt destinées aux feux de la scène qu’aux établissements de santé. Néanmoins, son intérêt pour les masques n’est pas nouveau.
« J’ai eu la chance de séjourner deux fois en Asie l’an dernier, notamment dans le cadre d’une école de terrain de Concordia au Japon. C’est là que j’ai découvert la mode du masque et son usage répandu dans la population. »
Marie-Christine s’ennuie du contact avec le monde des arts de la scène – lequel est fortement touché par les nombreuses annulations d’événements culturels survenues dans la foulée de la pandémie.
« Grâce à la promotion du masque comme mesure d’hygiène, je crois qu’il sera possible de relancer l’industrie de la culture », ajoute-t-elle.
Haidee Wasson reconnaît également la valeur d’une généralisation du port du masque.
« La confection de masques ne vise pas seulement le personnel soignant. Le masque deviendra sans aucun doute un accessoire normal dans la vie des gens au Canada – au même titre que la tuque ou le foulard, précise-t-elle. Le fait d’en fabriquer et d’en porter signifiera désormais que “la santé publique, ça concerne tout le monde”. »
« Porter un masque indique que nous sommes conscients des autres et reconnaissons le caractère encore inconnu du virus. Il est difficile de lutter contre un ennemi invisible. Le masque est une façon de manifester notre engagement et notre solidarité dans ce combat. »
Concordia tient à remercier tous les bénévoles du projet :
- Ava Acland
- Stella Acland
- June Aldinucci
- Anonyme
- Alex Bachmayer
- Théo Bignon
- Amélie Brindamour
- Amanda Clarke
- Emeren Garcia
- Molly-Claire Gillett
- Sara Hanley
- Gordie Ishizuka
- Julie Lambert
- Marie-Christine Larivière
- Johanne Massicotte
- Aaron Mcintosh
- Cecilia McKinnon
- Ashley Miller
- Lauren Osmond
- Etta Sandry
- Miranda Smitheram
- Megan Stein
- Christy Thompson
- Kathleen Vaughan
- Haidee Wasson
- Peter C. van Wyck
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