Il faut transformer en profondeur les services de justice pour la jeunesse, selon une chercheuse de Concordia
Denise Brend souhaite une transformation en profondeur des services de justice pour la jeunesse au Canada, afin que les traumatismes y soient pris en compte.
Professeure adjointe au Département des sciences humaines appliquées de l’Université Concordia, Denise Brend a travaillé dans le milieu de l’activisme communautaire et en travail social. Elle a pu constater que de nombreux obstacles sociaux et systémiques se dressent devant les jeunes et les personnes qui travaillent avec eux.
« J’ai véritablement pris conscience de cette réalité alors que je formais des intervenants jeunesse en milieu résidentiel depuis 15 ans », affirme-t-elle.
« Chaque année, je rencontrais des étudiants qui souhaitaient aider le mieux possible les enfants et les jeunes vulnérables. Les statistiques brossaient pourtant un autre portait : les choses n’allaient mieux ni pour les jeunes ni pour les intervenants. J’ai donc voulu comprendre ce qui menait à une telle souffrance au sein des systèmes pourtant censés l’alléger. »
À cette fin, Denis Brend a réalisé de nombreux travaux de recherche. Elle fait partie des cochercheurs du projet fédéral du Consortium canadien sur le trauma chez les enfants et les adolescents. La mission du consortium est d’unifier et d’améliorer les réponses sociales face aux traumatismes des enfants et des jeunes grâce aux progrès de la recherche, de la pratique, des politiques et du droit.
La chercheuse a également publié son étude initiale intitulée « Residential childcare workers in child welfare and moral distress » dans le numéro de décembre 2020 de Children and Youth Services Review. De plus, elle a corédigé l’article « Time to Shift the Canadian Paradigm: Youth Justice Services and Trauma-Informed Care » dans la publication Actualités justice de l’Association canadienne de justice pénale, avec Delphine Collin-Vézina, professeure à l’Université McGill.
Élargir la définition du traumatisme
Denise Brend s’attendait à découvrir des éléments témoignant de situations de détresse et d’événements traumatiques dans le système de protection de la jeunesse. Mais elle a tout de même été surprise par un aspect de sa recherche.
« J’ai constaté qu’une grande partie de la détresse n’était pas liée aux événements traumatiques dont les intervenants en milieu résidentiel avaient pu entendre parler ou qu’avaient pu vivre les enfants, les jeunes et les familles dont ils s’occupaient. Cette souffrance était plutôt liée au fonctionnement même du système de protection ou de justice de la jeunesse. »
Selon la Pre Brend, une transformation s’impose à l’échelle du système.
« Il a été démontré que les conséquences du stress post-traumatique peuvent aussi toucher les intervenants, qui sont continuellement exposés aux traumatismes vécus par les enfants et les jeunes. Et le stress post-traumatique peut nous empêcher d’aider les autres à la pleine mesure de nos capacités », indique Denise Brend.
« Pour que la transformation nécessaire s’effectue et pour que les gens ayant vécu des traumatismes puissent s’en sortir, il est crucial de modifier les systèmes actuels pour les adapter aux besoins de ces personnes. »
La chercheuse ajoute qu’on croit souvent à tort que les interventions tenant compte des traumatismes sont axées sur les expériences personnelles et leurs répercussions.
« En fait, ce genre d’interventions vise à diffuser les connaissances sur les incidences des traumatismes (peu importe leur nature : violence ou agression, racisme, colonialisme, sexisme ou homophobie), à l’échelle systémique. »
Lisez l’étude citée de Denise Brend dans Children and Youth Services Review. Apprenez-en plus au sujet du Département des sciences humaines appliquées de l’Université Concordia.