Skip to main content

Des chercheurs de Concordia luttent contre la prolifération des fleurs d’eau dans les lacs peu profonds grâce à une technique de filtration

L’expérience pilote in situ menée par Antônio Pereira et Catherine Mulligan donne des résultats prometteurs en matière d’assainissement des lacs eutrophes
18 avril 2023
|
Algae bloom
Liz Harrell, Unsplash

Les changements climatiques et l’activité humaine mettent à mal les plans d’eau du monde entier, et le vaste réseau de lacs du Canada n’est pas épargné. Dans les dernières décennies, l’augmentation des apports en nutriments a provoqué l’eutrophisation des lacs peu profonds qui parsèment la région laurentienne du Québec, au nord de Montréal. Le phénomène a entraîné une prolifération d’algues qui a rendu les lacs impropres et perturbé l’écosystème naturel.

La restauration de ces plans d’eau est une entreprise complexe et coûteuse. Or, une nouvelle méthode étudiée par des chercheurs du Département de génie du bâtiment, civil et environnemental de l’Université Concordia pourrait permettre de réduire les coûts et la main-d’œuvre nécessaire, tout en préservant l’environnement.

Dans la revue Water, l’équipe de recherche décrit un système de filtres géotextiles flottants qui enlèvent efficacement les solides en suspension, les algues et les nutriments des eaux lacustres peu profondes. Bien que son projet soit encore au stade de développement, elle estime qu’il pourrait être étendu afin de contribuer à la santé de plus grandes masses d’eau, comme les étangs, les rivières, les zones côtières et les baies.

Les travaux ont été menés par Antônio Cavalcante Pereira, doctorant, et Catherine Mulligan, professeure, avec la participation de Dileep Palakkeel Veetil, attaché de recherche, et Sam Bhat de Titan Environmental Containment.

Catherine Mulligan et Antônio Pereira dans leur laboratoire Catherine Mulligan et Antônio Pereira: « Sans aucun ajout de produits chimiques dans le lac, nous avons réussi à obtenir de bons résultats en matière de suppression des algues et de diminution de la turbidité pendant toute la saison estivale. »

Des solutions sans produits chimiques

À l’été et au début de l’automne 2019 et 2020, l’équipe a placé une demi-douzaine de couches de géotextile dans une unité de filtration flottante au lac Caron, un lac eutrophe peu profond situé à Sainte-Anne-des-Lacs, à environ 75 kilomètres au nord de Montréal. D’une profondeur maximale de 2,6 m, le lac fait l’objet d’un avis de restriction d’usage récréatif depuis 2008 en raison de la prolifération excessive d’algues.

Le dispositif de filtration en plexiglas est maintenu en flottaison au moyen d’un tube en caoutchouc gonflable au centre d’une aire fermée. Cet espace a été créé au moyen de rideaux de turbidité géotextiles suspendus depuis la surface de l’eau jusqu’au lit du lac ou à proximité pour empêcher que les solides ne se propagent dans le reste du lac.

On a prélevé tous les deux ou trois jours des échantillons d’eau du lac et des zones confinées afin d’analyser notamment la turbidité, la concentration de matières en suspensions totales (MEST), le taux de phosphore, de cyanobactéries (BGA-PC) et de chlorophylle a.

Les résultats d’analyses sont encourageants, si l’on se fie aux données sur l’efficacité moyenne de l’élimination recueillies en 2019/2020 :

  • Turbidité : réduction de 53 pour cent/17 pour cent
  • MEST : 22 pour cent/36 pour cent
  • Phosphore : 49 pour cent/18 pour cent
  • BGA-PC : 57 pour cent/34 pour cent
  • Chlorophylle a : 56 pour cent/32 pour cent

Selon M. Pereira, les variations d’une année sur l’autre résultent de l’hétérogénéité de la qualité de l’eau dans les lacs en raison des différents climats et des schémas de croissance des algues. En 2019, il y a eu une prolifération d’algues importante et visible, tandis qu’en 2020, les algues étaient plus dispersées dans l’ensemble de la masse d’eau.

« L’expansion de notre système pour l’assainissement des grands lacs est un objectif à long terme, mais la nouveauté réside dans le fait que nous utilisons simplement la filtration de l’eau in situ comme méthode d’assainissement des plans d’eau eutrophes, explique M. Pereira. Sans aucun ajout de produits chimiques dans le lac, nous avons réussi à obtenir de bons résultats en matière de suppression des algues et de diminution de la turbidité pendant toute la saison estivale. »

Un projet évolutif à long terme

La Pre Mulligan précise que cet article s’inscrit dans le cadre d’une série de travaux qui ont débuté en 2008. Le projet a connu plusieurs itérations au fil des ans et dans d’autres lacs de la région.

Les lacs peu profonds étudiés dans le passé ont souvent été créés par des promoteurs qui ont excavé des lacs existants et procédé à l’abattage partiel des arbres. Ces dernières années, la dégradation continue de ces souches d’arbres restantes ainsi que la libération possible de nutriments par les eaux de ruissellement et l’absence de schémas hydrologiques naturels ont contribué à la prolifération excessive et récurrente d’algues.

« La situation est complexe, car la qualité de l’eau change d’une année à l’autre, souligne la Pre Mulligan. Les températures plus chaudes tendent à favoriser la prolifération excessive d’algues dans les plans d’eau eutrophes. »

Ces travaux de recherche ont été financés conjointement par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), l’Université Concordia et Titan Environmental Containment.

Lire l’article cité (en anglais seulement) : « An In-Situ Geotextile Filtration Method for Suspended Solids Attenuation and Algae Suppression in a Canadian Eutrophic Lake »



Sujets tendance

Retour en haut de page

© Université Concordia