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L’extraordinaire parcours du diplômé Ed Rosenthal pour aider la NASA à cultiver des légumes dans l’espace

« Je dois tout à la Sir George Williams University et aux sacrifices faits par mes parents. »
20 avril 2022
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Par Ian Harrison, BComm 01


Ed Rosenthal, B.A. 1974, et son entreprise Florikan ont été intronisés au Space Technology Hall of Fame de la NASA en 2017.

Dans le diagramme de Venn des personnes diplômées de l’Université Concordia qui ont invité la légende du soul Ben E. King à un concert-bénéfice sur le campus, réalisé des travaux d’érudition sur Moby-Dick sanctionnés par la Melville Society, et breveté une technologie utilisée par la NASA pour cultiver des plantes dans l’espace, l’intersection ne contient qu’un élément : Ed Rosenthal, B.A. 1974.

M. Rosenthal a obtenu son diplôme de littérature anglaise de la Sir George Williams University quelques mois avant que l’établissement fusionne avec le Loyola College pour former l’Université Concordia. Il se définit comme « le fils d’un fermier pauvre qui a eu de la chance, a profité de toutes les occasions qui se sont présentées et a travaillé sans relâche ».

Ed Rosenthal a travaillé dur par nécessité. Né à New York en 1950, il déménage à Lachute, au Québec, pour que son père – un agriculteur roumain qui a vu son propre père mourir aux mains des nazis – puisse s’occuper d’un lopin de terre.

L’adaptation à la vie rurale est difficile pour Ed Rosenthal et sa mère, New-Yorkaise cosmopolite. L’antisémitisme est omniprésent (les Rosenthal sont les seuls juifs des environs) et la ferme périclite. Pour mettre de la nourriture sur la table, son père élargit ses activités et ouvre Magasin Royale, boutique de vêtements pour femmes.

« Je regardais mon père se démener et se battre, et je me sentais complètement impuissant, se souvient M. Rosenthal. La littérature est devenue mon refuge à l’école primaire, quand ma mère m’a fait découvrir Dickens et Twain ».

La Sir George Williams University « a déployé des efforts considérables »

Après le déménagement de la famille à Saint-Laurent (Montréal), Ed Rosenthal obtient une bourse complète pour étudier à la Sir George Williams University en 1968. Cette bourse change sa vie.

« Avec cet argent, j’ai pu aider mes parents financièrement. La Sir George Williams University a déployé des efforts considérables pour répondre à mes besoins. Je n’oublierai jamais la compassion et la générosité de Mervin Butovsky, qui était le vice-doyen de la Faculté des arts. »

Comme il utilise sa bourse pour s’occuper de ses parents, Ed Rosenthal subvient à ses besoins en travaillant à temps partiel au Bon Marché de Morgan – où il rencontre sa future épouse, Berthe (Betty) Hadida – et au magasin de vêtements pour hommes A. Gold & Sons, au centre-ville de Montréal.

M. Rosenthal se distingue également sur le campus. Il rédige un article remarqué sur le roman Moby-Dick d’Herman Melville, suit des cours de chimie des polymères – sujet de fascination qui lui sera profitable plus tard – et s’implique dans la gouvernance étudiante.

C’est ce contexte qui a donné lieu au concert de bienfaisance de Ben E. King.

Une collecte de sang organisée par Ed Rosenthal et ses pairs à la Sir George Williams University faisait l’objet d’une publication dans le journal de l’association des étudiants des cours du soir.

« En tant qu’organisateur d’une collecte de sang sur le campus, j’étais dans l’embarras parce que très peu d’étudiants voulaient donner leur sang, raconte M. Rosenthal. C’est alors que Bobby Chazonoff – qui était directeur de A. Gold & Sons et m’a initié aux affaires et au service à la clientèle – m’a conseillé d’aller voir Norm Silver, célèbre impresario qui dirigeait l’Esquire Show Bar. »

« Avant même que je m’en rende compte, Norm s’était arrangé pour que Ben E. King et son groupe jouent pour nous. Quand je les ai présentés sur scène, les étudiants étaient en délire! »

Le chanteur de Stand by Me a permis à la collecte de sang d’Ed Rosenthal d’éclipser « tous les records de quantité de sang collectée » par une université au Canada, comme l’a indiqué plus tard une lettre adressée au rédacteur en chef du journal The Georgian. »

Tel père, tel fils

Fort de sa réputation de macher (faiseur, c’est-à-dire personne d’action, en yiddish) à la Sir George Williams University, M. Rosenthal met à profit son intérêt pour la chimie des polymères et décroche un emploi chez Kord, fabricant ontarien de récipients en plastique destinés à l’industrie des pépinières et des serres. Ces contenants étaient une nouveauté dans les années 1970; la plupart des producteurs agricoles de l’époque utilisaient encore des pots en céramique, qui étaient coûteux et fragiles.

Ed Rosenthal était ravi de pouvoir aider les personnes qui, comme son père, travaillaient la terre. C’était une expérience rédemptrice, confie-t-il.

Après le référendum sur la souveraineté du Québec en 1980, M. Rosenthal accepte la proposition de Kord d’étendre ses activités commerciales aux États-Unis et s’installe en Floride avec sa femme, Betty, et ses fils, Jonathan et Eric.

Si Ed Rosenthal a pu installer sa mère dans le sud – elle a ensuite succombé à la maladie d’Alzheimer dans les années 1990 –, il n’en a pas été de même pour son père.

« Il est décédé d’un cancer de l’estomac, explique M. Rosenthal. Lorsqu’il était sur son lit de mort à l’Hôpital général de Montréal, il m’a demandé de regarder sous son lit à la maison. Il y avait une boîte en métal qu’il voulait me confier. »

« Il s’est avéré que cet homme, qui avait travaillé toute sa vie, avait économisé 35 000 dollars, un billet à la fois, pour que nous puissions commencer une nouvelle vie avec nos garçons. Même ma mère n’en savait rien. Aujourd’hui encore, je n’ai aucune idée de la façon dont il a fait cela. »

Ce don inattendu a fourni à Ed et à Betty Rosenthal les fonds de départ nécessaires pour acheter une maison à Sarasota et, en 1982, lancer Florikan ESA (Environmentally Sustainable Agriculture), l’entreprise qui allait faire la réputation d’Ed Rosenthal ainsi que lui permettre de constituer un héritage pour ses fils et de s’associer à la NASA.

Ayant pour mission d’« aider les producteurs à améliorer leurs méthodes de culture », Florikan s’inspire de l’exemple de Kord et encourage les pépiniéristes à augmenter leurs rendements grâce à des pots moins meilleur marché à base de polymères. Surnommés « Eddie pots », ces récipients sont devenus la norme dans le secteur.

Un moment de génie

Ed Rosenthal aurait pu se contenter de cette réussite. Mais après qu’un producteur eut exprimé sa frustration face à l’inefficacité des engrais hydrosolubles, il a eu un éclair de génie : il pouvait utiliser les leçons d’agronomie transmises par son père et ses connaissances en chimie pour élaborer une meilleure méthode.

Ce qu’Ed Rosenthal a ensuite testé et commercialisé – un engrais à libération contrôlée (ou CRF) – a attiré l’attention de la NASA. L’agence spatiale américaine compte maintenant sur le savoir-faire du diplômé de Concordia pour faire pousser des légumes à bord de la Station spatiale internationale.

Ed Rosenthal – photographié ici avec Gioia Massa, scientifique du projet au Kennedy Space Center de la NASA, et Betty Rosenthal – a « fait gagner à la NASA des années de recherche ».

Lorsque la NASA a intronisé Ed Rosenthal et Florikan au Space Technology Hall of Fame en 2017, Ray Wheeler, phytophysiologiste de renom, a affirmé à l’inventeur et homme d’affaires que son expertise avait fait gagner à la NASA des années de recherche.

« Le CRF présente des avantages tant pour les utilisateurs commerciaux que pour les particuliers, estime M. Wheeler. Avec Florikan CRF, nous n’avons désormais besoin que d’une seule application, qui peut durer des mois. Cette technologie permet d’éviter la libération rapide des nutriments, fonctionnement caractéristique de la plupart des engrais conventionnels, qui peuvent s’infiltrer dans le sol et même se retrouver dans les cours d’eau. »

Florikan a également reçu les éloges de l’ancien gouverneur de la Floride, Jeb Bush, et le prix du produit le plus innovant décerné par la National Society of Professional Engineers des États-Unis.

Le succès a rendu l’entreprise intéressante à acquérir et, après de nombreuses propositions, M. Rosenthal et sa famille ont vendu Florikan en octobre dernier, quarante ans après sa création.

« Betty et moi regrettons parfois le quotidien et les relations avec nos clients, confie-t-il. Mais nous voulions que nos garçons reçoivent leur héritage pendant que nous étions encore en vie. Le fait de les voir en profiter et de savoir que l’entreprise est entre de bonnes mains vaut tous nos efforts. »

En effet, selon les termes de la vente, Eric Rosenthal, titulaire d’un diplôme en systèmes intégrés de gestion de l’Université de Floride, supervise toujours Florikan en tant que PDG. Jonathan Rosenthal, diplômé de Penn Law, est consultant auprès de l’entreprise.

Quant à Ed Rosenthal, il peut désormais faire ce qu’il aime le plus : passer du temps avec ses quatre petits-enfants et travailler avec la NASA sur des projets qui profiteront ensuite à des cultivateurs comme son père – et à l’humanité.

« Je me sens béni d’avoir vécu le rêve américain, affirme-t-il. Et je dois tout cela à ma femme et à mes fils, aux sacrifices consentis par mes parents, et à la Sir George Williams University. »

50 ans de savoirs, 50 ans d’avenirs  marque l’anniversaire or et grenat de l’Université Concordia. De juin 2024 à juin 2025, ce jalon ralliera notre communauté de plus de 45 000 étudiants, 7 000 membres du personnel et du corps professoral, et 260 000 diplômés. Nous tirons une grande fierté de l’histoire de Concordia et imaginons notre avenir en ce point culminant de l’initiative sans précédent de collecte de fonds de l’Université, la Campagne pour Concordia : Place à la nouvelle génération.



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