Les archivistes actuels n’ont pas à relever des défis d’une telle ampleur, mais l’année 2024 s’annonce chargée pour eux en raison des nombreuses demandes provenant de groupes qui prévoient célébrer le 50e anniversaire de Concordia. Pour souligner l’occasion, le service collabore également avec la Bibliothèque de Concordia à la création d’une chronologie virtuelle des événements qui ont marqué l’histoire de l’Université. D’ailleurs, il n’a pas été facile de ramener le nombre d’histoires intéressantes à un chiffre raisonnable.
« Au départ, nous avions 700 événements pour constituer la chronologie, sourit Eric Côté. Nous avons réduit ce chiffre à environ 300. »
Parmi ces événements, citons l’annulation des cours au Loyola College en 1918 en raison de la pandémie de grippe; le premier numéro du Concordia University Magazine en 1977, dans lequel le géant de la littérature Mordecai Richler raconte avec humour ses années passées à la Sir George Williams University; la mise en œuvre de la politique de Concordia en matière de VIH/sida en 1988 (faisant de l’Université l’une des premières au Canada à publier des directives officielles sur l’éducation et les services de santé en matière de sida); et la création en 1999 de la Patate du peuple pour lutter contre la faim chez les personnes étudiantes.
Une pierre angulaire de la préservation
À l’approche des festivités entourant l’anniversaire de Concordia, l’importance de ces événements et de ces jalons – et la façon dont ils ont renforcé l’Université – prend de plus en plus de sens. Il en va de même pour le rôle du Service de la gestion des documents et des archives en tant que gardien et promoteur de ce riche passé.
L’un des événements les plus marquants de la chronologie virtuelle, par exemple, s’est déroulé au printemps 1968, lorsque six personnes étudiantes noires de la Sir George Williams University ont accusé un professeur de discrimination raciale.
Comme le problème n’était toujours pas résolu l’hiver suivant, quelque 200 étudiantes et étudiants ont décidé d’occuper un centre informatique et une salle des professeurs du pavillon Henry‑F.‑Hall. Leur objectif était de montrer leur mécontentement quant à la manière dont l’administration gérait les allégations et, plus généralement, le racisme sur le campus.
Douze jours plus tard, après l’échec des négociations entre les étudiants et l’administration, l’Université a fait appel à la police. Dans le chaos qui s’en est suivi, les policiers ont arrêté 97 personnes étudiantes, entraînant pour certaines la perte de leur emploi, l’arrêt de leurs études, une peine de prison, voire la déportation. Les personnes qui l’ont vécu se souviendront toujours de l’incident, mais ce dernier aurait pu être facilement oublié par la communauté élargie si les documents n’avaient pas été archivés, puis réexaminés et mis en évidence au fil des ans.
Par exemple, en 2015, l’Office national du film a pu réaliser un documentaire sur le sujet en utilisant des images d’archives bien préservées qui avaient été filmées à l’origine sur des bandes vidéo.
Depuis, Concordia a présenté des excuses officielles pour sa gestion de ces plaintes pour racisme, pour les préjudices causés aux personnes qui manifestaient et pour son silence sur ces questions au cours des décennies qui ont suivi.
Selon Eric Côté, ce dénouement illustre l’importance de cataloguer le passé; pour lui, c’est une bonne chose que Concordia le fasse depuis cinq décennies.