Stress et temps d’écran : le lien est étroit, indique une nouvelle recherche de l’Université Concordia
La question de la relation qu’entretiennent les humains avec leurs appareils à écran est un sujet complexe. D’une part, nous adorons les utiliser. D’autre part, des millions d’entre nous sont mentalement et émotionnellement absorbés par leurs écrans et en subissent de réelles conséquences sur leur santé.
Dans un article publié récemment dans la revue Journal of Medical Internet Research, Najmeh Khalili-Mahani explore le lien entre l’usage d’appareils à écran et le stress chez l’humain, en particulier chez les personnes consciemment accros aux écrans. Neuroscientifique de profession, Najmeh Khalili-Mahani travaille au Centre PERFORM de l’Université Concordia.
Grâce à une enquête en ligne de plus de 60 questions, les membres de l’équipe de recherche ont interrogé plus de 650 répondantes et répondants sur les types d’écrans auxquels ils se disaient dépendants (télévision, téléphone intelligent, console de jeux, tablette, etc.) ainsi que les motifs pour lesquels ils les utilisaient. Le sondage comportait en outre une auto-évaluation subjective sur la dépendance aux écrans. Celle-ci était assortie d’une série de questions quantitatives sur le nombre d’heures consacrées à des activités sur écran et l’intensité de comportements de dépendance comme l’utilisation compulsive, le retrait, la perte de la notion du temps ou des tâches à faire, ou une attitude défensive à l’égard de l’utilisation des écrans. Les chercheurs ont en outre recueilli, selon une démarche semblable, des données sur les différents types de stress liés à des événements précis de la vie quotidienne tels que problèmes relationnels, difficultés financières, deuils et ainsi de suite. À titre de contrôle quantitatif, ils ont calculé le degré d’intensité de facteurs de stress liés aux émotions, aux perceptions, à la santé et au mode de vie au moyen de questionnaires précis.
« Nous n’avons toutefois pas exploré le phénomène du jeu de hasard et d’argent en ligne, précise Najmeh Khalili-Mahani. Ce comportement mérite que l’on s’y attarde dans le cadre d’une étude distincte. »
« Les personnes qui se considéraient comme dépendantes étaient, en effet, celles qui consacraient le plus de temps aux écrans, précise-t-elle. De plus, celles qui se disaient dépendantes aux écrans étaient plus susceptibles de présenter des scores élevés pour tous les types de stress. »
Toutefois, la tendance inverse ne s’est pas avérée. Plus de 60 pour cent de la totalité des répondants ont signalé au moins un type de stress, qu’il s’agisse d’un deuil, de problèmes financiers, de difficultés relationnelles, de problèmes de santé ou d’examens scolaires. Or, seulement un tiers d’entre eux se sont décrits comme étant accros aux écrans. Les sources importantes de stress comme le deuil et les problèmes de santé chroniques n’ont pas été associées à quelque différence que ce soit dans l’usage d’écrans. Toutefois, les problèmes financiers, les examens scolaires, les difficultés relationnelles et les problèmes de santé mentale (autoévalués) ont été associés à une plus grande dépendance aux réseaux sociaux.
Le plaisir que procurent les écrans mène-t-il au stress?
Najmeh Khalili-Mahani invite à la prudence quant aux conclusions que l’on pourrait tirer sur le lien de causalité entre le stress et l’usage d’écrans.
« Les personnes qui se disent dépendantes aux écrans sont plus susceptibles d’être celles qui passent beaucoup de temps sur les réseaux sociaux, à jouer à des jeux ou à utiliser les appareils à écran pour se détendre », nuance-t-elle.
« Les répondants qui s’identifiaient comme étant dépendants aux écrans étaient aussi plus stressés sur le plan émotionnel. Il conviendrait d’étudier davantage les différences subjectives dans les motifs que l’on donne pour justifier l’usage d’écrans aux fins de loisirs. »
Selon la chercheuse, il est plausible que les personnes qui avouent être dépendantes perçoivent plus de culpabilité à l’égard du temps qu’elles passent sur les réseaux sociaux, par opposition au temps qu’elles consacrent à suivre les nouvelles ou à chercher de l’information – activités qui se sont révélées être les plus importantes pour tous les groupes de répondants.
Des outils de mieux-être mobiles
Les chercheurs exploitent les résultats de ces travaux dans l’élaboration d’outils électroniques de santé mentale pour atténuer le stress chronique. Ces outils sont destinés à un usage sur appareil à écran – de préférence mobile, car les personnes qui se disent dépendantes aux écrans accordent une grande valeur à la portabilité, à la communication et aux loisirs.
« Il s’est avéré que le stress émotionnel constitue un facteur de prédiction très important de l’usage d’écrans. C’est donc cet aspect que nous comptons examiner de plus près dans nos prochains travaux, annonce Najmeh Khalili-Mahani. Nous sommes d’avis que les écrans peuvent servir à réaliser une sorte d’intervention émotionnelle, et nous préconisons une démarche axée sur le jeu afin de la rendre plus relaxante et amusante. »
Cette étude a bénéficié d’une bourse du Service de la recherche de Concordia.
Lisez l’étude citée (en anglais seulement) : To Each Stress Its Own Screen: A Cross-Sectional Survey of the Patterns of Stress and Various Screen Uses in Relation to Self-Admitted Screen Addiction.