La recharge simultanée de milliers de véhicules électriques représentera un défi de taille pour les villes, souligne un chercheur de l’Université Concordia
La demande en véhicules électriques (VE) connaît ces dernières années une hausse constante qui devrait se poursuivre dans les pays riches comme dans les pays en développement. Toutefois, selon les projections présentées par le cabinet d’experts-conseils Deloitte dans un récent rapport, cette demande devrait ralentir considérablement après 2030 si des solutions durables ne sont pas trouvées face aux défis liés à l’infrastructure des bornes de recharge.
Dans un nouvel article publié dans le World Electric Vehicle Journal, Claude El-Bayeh, boursier postdoctoral au Département de génie électrique et informatique de l’École de génie et d’informatique Gina-Cody, examine les stratégies actuelles et futures en matière de recharge et de décharge des véhicules électriques. En tenant compte de variables comme les aspects économiques, les effets sur les réseaux électriques et leur complexité, M. El-Bayeh et ses collègues comparent et évaluent les stratégies en place et planifiées. Khaled Alzaareer de l’UQAM, Al-Motasem Aldaoudeyeh de l’Université technique de Tafila, en Jordanie, Brahim Brahmi de l’Université McGill et Mohamed Zellagui de l’Université de Batna, en Algérie, sont les coauteurs de l’article.
Réciprocité du réseau
Les chercheurs ont relevé 14 stratégies distinctes qui peuvent être réparties dans deux grandes catégories : d’une part, les stratégies unidirectionnelles, par lesquelles un VE puise l’électricité directement sur le réseau pour recharger sa batterie, et d’autre part, les stratégies bidirectionnelles, par lesquelles l’énergie accumulée dans la batterie du véhicule est redistribuée au réseau. M. El-Bayeh estime que les technologies de recharge bidirectionnelle des VE ne devraient se généraliser que dans une vingtaine d’années.
Les recharges et décharges peuvent être coordonnées ou non. Dans une stratégie non coordonnée, le type le plus répandu aujourd’hui, chaque propriétaire de VE recharge son véhicule directement sur le réseau sans aucune planification, sans faire appel à des techniques d’optimisation et en faisant fi des contraintes pesant sur le réseau électrique ou des mécanismes de formation des prix. Une stratégie coordonnée tient compte de toutes ces variables et fait appel à des algorithmes complexes pour calculer la meilleure façon de recharger simultanément de grands nombres de VE sans surcharger le réseau.
« S’il y a un million de voitures électriques et qu’elles sont toutes mises en charge en même temps, il y aura énormément de problèmes sur le réseau et il pourrait en résulter des pannes d’électricité, explique M. El-Bayeh. Au lieu d’améliorer la stabilité du réseau et de réduire la pollution grâce aux véhicules électriques, nous obtenons l’effet inverse. C’est pourquoi nous devons mettre au point des algorithmes qui assurent un équilibre entre les contraintes exercées sur les réseaux et les besoins des conducteurs de VE. »
Après avoir examiné chacune des 14 stratégies, le chercheur et ses collègues concluent en retenant deux options les plus prometteuses. La première est la stratégie coordonnée de recharge et de décharge directes continues. Cette stratégie fait intervenir des techniques d’optimisation pour recharger et décharger les VE en tenant compte des prix élevés de l’électricité observés aux heures de pointe.
L’autre option retenue est la stratégie coordonnée de recharge et de décharge directes discrètes. Semblable à la première, elle se distingue en décomposant le temps de charge en petites unités, ce qui a pour effet de réduire la demande de pointe et de la stabiliser sur une période prolongée. Les chercheurs soulignent que, même si ces deux approches semblent les plus prometteuses, elles sont loin d’être suffisamment au point pour être mises en œuvre.
Mobilisation collective
Toujours dans cette optique d’avenir, M. El-Bayeh affirme que les concepteurs de véhicules, les services publics et les planificateurs municipaux peuvent et devraient en faire davantage pour faciliter la transition des véhicules à moteur à combustion interne vers l’électrique.
« Cela passe par le développement de voitures et d’autobus solaires, ce qui réduirait la dépendance à l’égard du réseau et, par conséquent, la demande de pointe et les pertes d’énergie, affirme-t-il. Nous devons également travailler à l’introduction de technologies et de systèmes d’énergies renouvelables comme les cellules photovoltaïques et les éoliennes, et encourager davantage de gens à les installer sur leur toit. »
Lire l’article cité (en anglais seulement) : « Charging and Discharging Strategies of Electric Vehicles: A Survey ».