De meilleures prévisions de la vitesse des vents peuvent faciliter la production d’électricité en milieu urbain, selon une nouvelle étude de l’Université Concordia
À l’ère de la transition des combustibles fossiles vers les sources d’énergie renouvelables, l’électricité d’origine éolienne est appelée à devenir une composante essentielle de la capacité énergétique mondiale. La vitesse du vent constitue un paramètre clé pour estimer le potentiel éolien d’une région. Or, prédire la vitesse du vent est un exercice complexe. Il représente notamment un défi pour les services publics, qui ont besoin de s’appuyer sur des estimations fiables pour alimenter leurs réseaux.
Plusieurs modèles existants permettent déjà de prédire la vitesse du vent, mais avec un degré variable de précision et de fiabilité. Dans le cadre d’une étude dirigée par Concordia et parue dans la revue Energies, une équipe de recherche du Département de génie du bâtiment, civil et environnemental de l’École de génie et d’informatique Gina-Cody propose une méthode hybride combinant plusieurs modèles de prévision.
Selon les chercheurs, cette méthode hybride peut améliorer la précision des prévisions dans une proportion allant jusqu’à 30 %. Le projet a été lancé dans le cadre de la thèse de Navid Shirzadi (Ph. D. 2023), qui poursuivait alors ses études doctorales et travaillait à construire un microréseau pour le campus du centre-ville de l’Université Concordia.
La méthode proposée repose sur l’analyse de données et de résultats provenant de deux sources : la distribution de probabilité de Weibull et la prévision numérique du temps (PNT). Dans ce modèle, la loi de Weibull permet de prédire la vitesse du vent à partir de données historiques et d’autres variables. Quant à la PNT, elle s’appuie sur les tendances actuelles pour prédire les tendances futures à l’aide d’un algorithme complexe et de grande envergure. Les PNT sont couramment utilisées par les services météorologiques et les applications pour établir des prévisions horaires et quotidiennes.
Bien que ces modèles présentent des avantages, M. Shirzadi estime qu’ils comportent des limites importantes lorsqu’il s’agit de les appliquer à la production d’électricité.
« Le comportement stochastique des énergies renouvelables et leurs fluctuations compliquent considérablement la conception et l’exploitation d’un microréseau », explique-t-il.
« Il n’y a pas de schéma particulier ou de saisonnalité que l’on peut facilement détecter. Nous avons besoin d’un modèle très solide pour prédire la production d’énergie éolienne. »
Les chercheurs ont d’abord fusionné les statistiques issues du modèle de Weibull dans un réseau de mémoire à long et court terme (MLCT). Ce type de réseau neuronal récurrent est particulièrement utile pour l’analyse de séries chronologiques. Les chercheurs ont ensuite ajouté des données provenant du PNT afin de raffiner leur modèle.
L’hybridation initiale entre la MLCT et la distribution de Weibull a donné des résultats prometteurs, selon M. Shirzadi. L’ajout du PNT a permis de perfectionner le modèle : les erreurs de prévision ont été réduites de 32 % par rapport aux prévisions fournies par la MLCT non hybridée, sur un horizon de 48 heures.
Un vent de progrès
Bien que l’énergie éolienne soit en plein essor dans le monde entier, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre la cible internationale de zéro émission nette d’ici 2050. Selon l’Agence internationale de l’énergie, pour parvenir à la carboneutralité d’ici le milieu du siècle, il faudra produire 7 400 térawattheures (TWh) uniquement à partir de l’énergie éolienne d’ici la fin de la présente décennie. La production mondiale d’électricité éolienne s’élève aujourd’hui à 2 100 TWh, ce qui signifie qu’une forte croissance annuelle des investissements sera nécessaire dans un avenir prévisible.
D’après Fuzhan Nasiri, professeur agrégé et coauteur de l’étude, cette recherche – ainsi que d’autres travaux en cours menés par l’Institut des villes nouvelle génération et les membres de l’initiative Volt-age – pourrait contribuer aux efforts de Concordia en matière de décarbonation. L’Université est d’ailleurs en voie d’atteindre ses propres cibles en matière de carboneutralité d’ici 2050, ce qui en fait un leader à l’échelle canadienne.
« Nous devons diversifier nos sources d’énergie. Les ressources locales font partie de la solution », indique M. Nasiri.
« Nous ne pouvons pas compter uniquement sur le réseau existant, qui peut être vulnérable aux catastrophes naturelles, comme les tempêtes de verglas. L’énergie éolienne sert de tampon en cas de panne de courant. Il est donc crucial de connaître précisément la vitesse du vent afin de déterminer la zone la plus favorable au bon fonctionnement des turbines. »
La professeure Ursula Eicker a fourni des travaux de recherche complémentaires. Ramanunni Menon et Pilar Monsalvete, chercheurs postdoctoraux à l’Université Concordia, ainsi qu’Anton Kaifel, du Centre de recherche sur l’énergie solaire et l’hydrogène à Stuttgart, en Allemagne, ont également participé à l’étude.
La recherche a été financée par le Programme de subventions à la découverte du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et le Secrétariat des programmes interorganismes à l’intention des établissements.
Lisez l’article cité : « Smart Urban Wind Power Forecasting: Integrating Weibull Distribution, Recurrent Neural Networks, and Numerical Weather Prediction ».