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La COVID-19 a touché plus largement les Canadiens atteints de maladies non transmissibles que leurs concitoyens non atteints, selon un nouveau rapport

L’étude iCARE révèle à quel point la santé mentale de nombreux malades chroniques s’est dégradée
9 janvier 2024
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Selon des chercheurs du Centre de médecine comportementale de Montréal (CMCM), les personnes atteintes de maladies non transmissibles (MNT), telles que les maladies cardiaques, le cancer, le diabète ou les affections pulmonaires chroniques, ont été touchées de manière disproportionnée par la pandémie de COVID-19.

Le nouveau rapport s’inscrit dans le cadre de l’étude iCARE (International COVID-19 Awareness and Responses Evaluation Study).

Le document révèle en outre que les femmes qui vivent avec une MNT déclarent souffrir d’une plus grande détresse psychologique – tel un sentiment d’isolement et de solitude – que les hommes. Pour leur part, les hommes atteints de MNT ont signalé une consommation accrue d’alcool.

Rédigé sur la base d’une étude de population en cours, le nouveau compte rendu a été publié dans la revue BMC Public Health. Les chercheurs ont recueilli les données de huit échantillons transversaux représentatifs du Canada entre juin 2020 et février 2022. Plus de 24 000 personnes interrogées en ligne ont participé à l’étude.

« Nous constatons une dégradation inégalée de la santé mentale chez les personnes atteintes de maladies non transmissibles par rapport à celles qui ne le sont pas », affirme Simon Bacon, professeur au Département de santé, de kinésiologie et de physiologie appliquée de la Faculté des arts et des sciences.

Le Pr Bacon est un des codirecteurs du CMCM.

« L'activité physique et les habitudes alimentaires se sont dégradées. Et, plus inquiétant encore, les personnes atteintes de maladies non transmissibles ont été touchées de manière disproportionnée pour ce qui est des annulations de rendez-vous médicaux », poursuit-il.

« Cela signifie que des personnes qui utilisent probablement davantage le système de soins de santé – et qui doivent y faire appel en raison de leur état – sont désormais confrontées en tant que groupe à des niveaux plus élevés de restriction d’accès en raison des pressions exercées sur l’ensemble du système. »

Les chercheurs constatent que les personnes participantes qui ont signalé des MNT étaient en général plus âgées, avaient un niveau de scolarité équivalent ou inférieur au diplôme d’études secondaires et déclaraient un revenu de ménage annuel inférieur à 60 000 dollars canadiens. Elles étaient par ailleurs plus susceptibles de déclarer avoir reçu un diagnostic de troubles mentaux.

Les personnes participantes atteintes de MNT étaient en outre 21 pour cent plus susceptibles de faire état d’anxiété, de dépression, de solitude et de colère notable induites par le COVID que les personnes ne souffrant pas de MNT. Elles avaient aussi plus tendance à déclarer qu’elles faisaient moins d’activité physique (24 pour cent) et avaient une alimentation moins saine (22 pour cent).

Qui plus est, les personnes de ce groupe étaient 57 pour cent plus susceptibles de faire état de rendez-vous médicaux annulés ou d’évitement des urgences. Enfin, elles étaient plus portées à déclarer avoir eu des difficultés à accéder à des soins médicaux non liés à la COVID, et ce, dans une proportion de 87 pour cent.

Simon Bacon porte une chemise à rayures bleues et brunes. « Nous constatons une dégradation sans précédent de la santé mentale chez les personnes atteintes de maladies non transmissibles par rapport à celles qui ne le sont pas », affirme Simon Bacon.

Les femmes, plus touchées que les hommes

La pandémie a également eu des répercussions plus importantes sur la santé globale des femmes, atteintes ou non de MNT, que sur celle des hommes.

Les femmes atteintes d’une MNT étaient plus portées à se dire anxieuses en raison de la COVID que les hommes atteints d’une MNT. Les hommes aux prises avec une MNT étaient plus susceptibles de se sentir anxieux à cause de la COVID que les hommes non atteints. Des tendances similaires ont été observées en ce qui concerne la dépression.

Des différences entre les sexes ont également été constatées en matière de consommation d'alcool. Les femmes atteintes d’une MNT étaient moins portées à déclarer qu’elles buvaient plus d’alcool à cause de la COVID que les femmes ne souffrant pas d’une MNT. Toutefois, les hommes atteints d'une MNT étaient plus susceptibles de déclarer une consommation d'alcool plus importante en raison de la COVID que les hommes qui n’en souffraient pas.

D’autres répercussions à l’horizon

Pour le Pr Bacon et ses collègues, ces indicateurs sont préoccupants. Le chercheur fait observer qu’à mesure que les restrictions liées à la pandémie s’assouplissent, un plus grand nombre de personnes atteintes de MNT – en particulier celles qui n’ont pas été traitées au plus fort de la pandémie – auront probablement davantage besoin de soins urgents.

Cette croissance de la demande en matière de soins est aggravée par l’augmentation du nombre de personnes ayant développé des MNT pendant la pandémie en raison du vieillissement et d’autres facteurs. Par conséquent, les fournisseurs de soins de santé peuvent se trouver débordés, même si les cas de COVID diminuent en nombre et en gravité.

« De nombreuses personnes atteintes de maladies non transmissibles reviennent dans le système avec un déficit de santé beaucoup plus important. Le système, qui a déjà du mal à rattraper son retard, est en train de s’effondrer », souligne le Pr Bacon, qui est aussi cotitulaire d’une chaire de recherche du FRQS sur l’IA au service du changement des comportements en matière de santé.

« Il existe un risque de cercle vicieux qui ajoutera une pression supplémentaire sur le système. Cette situation peut avoir pour conséquence que des personnes recommencent à éprouver des difficultés d’accès aux soins. Nous n’avons pas les ressources nécessaires pour traiter à la fois les personnes qui se trouvent actuellement dans le système et celles qui y entrent. »

« Nous ne disposons d’aucune stratégie pour nous attaquer à ce problème. »

Le compte rendu d’étude a été corédigé par Frédérique Deslauriers, Camille Léger et Kim Lavoie de l’Université du Québec à Montréal. Vincent Gosselin-Boucher de l’Université de la Colombie-Britannique et Ariany Marques Vieira de l’Université Concordia ont également participé à la rédaction du document.

L’étude iCARE reçoit l’appui des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), des Chaires de recherche du Canada, du Fonds de recherche du Québec – Santé, du Fonds de recherche du Québec – Société et culture et du ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec.

Lisez l’article cité (en anglais seulement) : The impact of COVID-19 on the lives of Canadians with and without noncommunicable chronic diseases: results from the iCARE Study.



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