Grande Concordienne : Mandy Gull-Masty, Grande Chef de la nation crie d’Eeyou Istchee
Mandy Gull-Masty, B.A. 2006, B.A. 2008, est entrée dans l’histoire le 29 juillet 2021 en devenant la première femme élue Grande Chef du Grand conseil des Cris (Eeyou Istchee).
Membre de la Première Nation crie de Waswanipi, elle dirige aujourd’hui une entité politique qui représente près de 18 000 personnes dans les vastes régions de la baie James et du Nunavik, dans le Nord-du-Québec.
En tant que Grande Chef, Gull-Masty entend trouver un équilibre entre le développement durable des ressources et la préservation de la terre, de la langue et de la culture cries, piliers centraux de sa vision d’avenir pour le territoire d’Eeyou Istchee.
Gull-Masty est fondatrice de la première société de conseil en gestion détenue par une femme crie, Kapatakun Consulting, qui a offert pendant plusieurs années ses services aux membres d’Eeyou Istchee. Avant d’occuper son poste actuel, Gull-Masty a par ailleurs été Grande Chef adjointe; à ce titre, elle a contribué à des initiatives visant à harmoniser les valeurs cries avec les projets provinciaux. Il s'agit notamment de la monumentale Grande Alliance, d'une valeur de 4,7 milliards de dollars, un cadre pour le développement des infrastructures et la protection de l'environnement qui a été le principal travail de l'ancien grand chef Abel Bosums.
« Nous sommes confiants dans nos décisions de développement, car nous donnons toujours la priorité au point de vue de chaque personne, en plus de fonctionner par consensus », déclare Gull-Masty à ce sujet. « Il s’agit d’un plan à long terme crucial, et son évolution dépendra ultimement de ce que nos membres accepteront. »
« Grâce à notre solide expérience en matière de protection, nous nous attachons à respecter le mode de vie des Cris et à nous harmoniser avec l’environnement. En fin de compte, c’est la population qui décidera de l’orientation que nous prendrons, et un délai supplémentaire sera accordé pour assurer une prise de décision réfléchie. »
À l’Université Concordia, Gull-Masty est titulaire d’un double diplôme de premier cycle en science politique et en études des affaires publiques et communautaires et analyse des politiques, programmes qu’elle a suivis tout en étant mère de famille et en travaillant comme adjointe de direction du Grand Chef adjoint.
Son expérience à Concordia lui a permis de jeter des ponts entre théorie et pratique, compétence qu’elle juge aujourd’hui essentielle dans ses fonctions de dirigeante.
« Appliquer et mettre en pratique ce que j’apprenais à l’Université dans mon emploi au jour le jour a été un véritable défi », se souvient-elle, ajoutant que ses études lui ont permis d’acquérir « une compréhension globale des méthodes de prise et de présentation d’une décision politique ».
Aujourd’hui, sa longue carrière – qui s’étend sur plus de douze ans dans l’administration et la fonction publique cries – repose sur une vision d’autosuffisance pour la nation crie. Son leadership met l’accent sur quatre piliers qui, selon elle, assureront la vitalité de l’Eeyou Istchee : un modèle de gouvernance cri, la préservation de la langue, la protection de la terre et une économie mixte crie.
« Mon objectif à long terme ne se limite pas à signer des accords ou à lancer des projets – je veux repenser nos processus internes et moderniser notre gouvernance pour garantir une prise de décisions inclusives à tous les niveaux », explique la Grande Concordienne. « L’année prochaine marquera les 50 ans de notre accord avec le Québec; dans ce contexte, nous explorons les moyens d’actualiser nos services afin de mieux servir nos collectivités – de l’élaboration des politiques à l’investissement culturel et linguistique. »
Qu’est-ce qui vous vient spontanément à l’esprit quand vous repensez à vos études à Concordia?
Mandy Gull-Masty : Mes années à Concordia ont été très enrichissantes. Je me suis inscrite au programme de science politique afin de comprendre comment les décisions gouvernementales sont prises. C’était d’autant plus stimulant que je travaillais également au sein du gouvernement cri en tant qu’adjointe de direction du Grand Chef adjoint de l’époque. Appliquer ce que j’apprenais en classe dans mon travail quotidien était difficile : ce qu’on apprend en théorie ne correspond pas toujours à la réalité! Mais j’ai aimé la structure du programme, en particulier l’ajout de l’analyse des politiques et des affaires publiques au cursus de science politique. Cette combinaison m’a dotée d’une perspective très complète, non seulement sur la façon dont les décisions politiques sont prises, mais aussi sur la manière dont elles sont présentées. Concilier études, travail et parentalité a été intense, mais cela m’a permis de comprendre l’importance de ce que j’apprenais et comment je pouvais l’intégrer dans mon travail.
Quels sont certains des facteurs qui ont contribué à votre réussite?
M.G.M. : L’étude des relations publiques m’a vraiment aidée à comprendre l’importance du message communiqué. Aujourd’hui, en tant que dirigeante, je vois à quel point il est indispensable de communiquer clairement et de s’assurer que les gens comprennent le message. C’est essentiel pour tout leader, en particulier lorsqu’il s’agit d’encourager les gens à soutenir un point de vue plutôt qu’un autre.
Le fait d’être une étudiante plus âgée et une mère active au sein d’un groupe d’étudiants plus jeunes m’a dotée une perspective unique. Ma formation à Concordia m’a appris à appliquer des compétences théoriques dans des environnements concrets – et cela a joué un rôle déterminant dans ma carrière.
Quel conseil auriez-vous à donner aux étudiantes et étudiants qui voudraient suivre vos traces?
M.G.M. : Pour moi, il était primordial d’expérimenter différentes fonctions avant de me lancer dans un poste de direction. J’ai commencé comme secrétaire, puis je suis devenue adjointe de direction, attachée politique, et ainsi de suite. Toutefois, l’objectif n’était pas seulement d’occuper différents rôles, mais également de nouer des relations dans chacune de ces fonctions. Je conseille donc aux étudiants et aux professionnels en début de carrière de rencontrer autant de personnes que possible, de chercher des mentors et d’écouter les gens qui les inspirent. Les expériences qui m’ont le plus marquée sont celles que j’ai vécues en aidant directement des personnes qui en avaient besoin, qu’il s’agisse de soutenir quelqu’un en situation de crise, d’aider pour des funérailles ou simplement d’apporter un soutien dans des moments difficiles. Ces expériences m’ont nourrie de compassion, valeur que j’estime essentielle à un leadership efficace.
Quel effet cela vous fait-il d’avoir été nommée Grande Concordienne?
M.G.M. : Je ne m’attendais pas à une telle reconnaissance. Lorsque j’ai commencé à étudier à Concordia, je voulais simplement comprendre comment les décisions étaient prises. Je voulais surtout m’assurer que les décisions serviraient au mieux les intérêts du plus grand nombre au sein de ma communauté. C’est un honneur de faire partie d’une cohorte aussi exceptionnelle de diplômés. Quand je repense à l’époque où j’étais étudiante et mère de famille – un véritable défi! –, je réalise à quel point cette reconnaissance représente énormément pour moi. Je suis fière d’avoir été nommée Grande Concordienne.
Tirez fierté de nos Grandes Concordiennes et Grands Concordiens !
Cinquante diplômés remarquables recevront cette reconnaissance dans le cadre du 50e anniversaire de l’Université. Chacune de ces personnalités a apporté une contribution majeure à son domaine d’activité et à la société.
Nous présenterons une personnalité d’exception chaque semaine jusqu’au mois de juin 2025.
Cette nouvelle cohorte s’inscrit dans la continuité du palmarès des 40 personnes d’exception établi à l’occasion du 40e anniversaire de l’Université.