« Les jeunes qui quittent la prise en charge doivent relever d’énormes défis dans leur transition à l’âge adulte »
« Chaque année au Québec, quelque 1 000 jeunes quittent la prise en charge à l’âge de 18 ans », affirme Varda Mann-Feder, professeure au Département des sciences humaines appliquées de l’Université Concordia.
« Or, le Québec est actuellement la province qui assure le moins de droits à ces jeunes, dont nombre ont été retirés de leur foyer en raison de sévices et de négligence, et n’ont pas de soutien familial après des années de placement », poursuit-elle.
« Le gouvernement est essentiellement leur parent, et ils doivent relever d’énormes défis dans leur transition à l’âge adulte, et ce, à un très jeune âge et sans aide ou presque. »
La Pre Mann-Feder travaille auprès de jeunes qui quittent la prise en charge depuis des décennies. Ses recherches lui ont permis de conclure qu’ils figurent parmi les groupes les plus défavorisés de la province. Ils n’ont en effet aucun accès aux ressources disponibles dans d’autres régions du pays, telles qu’un logement subventionné, un soutien financier continu, des services de santé et de santé mentale ainsi que des programmes de bourses d’études.
« Il existe une profonde injustice territoriale en ce qui concerne les droits des jeunes qui quittent la prise en charge, souligne-t-elle. Il est très important d’attirer plus d’attention sur cette situation. »
Une chef de file du domaine
Plus tôt cette année, Varda Mann-Feder comptait parmi les six finalistes du prix national Lynn Factor Stand Up for Kids de la Fondation pour l’aide à l’enfance du Canada.
Récompensant les contributions exceptionnelles en matière de protection de l’enfance au Canada, le prix reconnaît les chefs de file qui ont consacré un temps et des efforts considérables à améliorer la vie des jeunes vulnérables partout au pays qui se trouvent actuellement dans le système de protection de l’enfance ou qui en sont sortis.
Initialement psychologue spécialisée dans la protection de l’enfance, Varda Mann-Feder est devenue professeure tout en poursuivant son travail en dehors du milieu universitaire. Elle a en outre contribué à des centaines d’articles, de rapports et de livres sur le sujet.
Cocréatrice du diplôme de deuxième cycle en travail auprès des jeunes de Concordia, elle a également appuyé le développement de CARE Jeunesse, réseau provincial de jeunes et d’anciens jeunes pris en charge au Québec, avec l’aide du Centre d’études en relations humaines et communautaires ainsi que du Bureau de l’engagement communautaire.
La Pre Mann-Feder souligne par ailleurs le soutien qu’a apporté Jennifer Gold, directrice adjointe des dons planifiés au Bureau de l’avancement universitaire, à des initiatives qui ont permis la création de deux bourses de subsistance de Concordia destinées aux jeunes pris en charge.
Une nomination inspirante
La présidente de CARE Jeunesse a mis Varda Mann-Feder en nomination pour le prix parce qu’elle fournit soutien et mentorat aux fondateurs et aux leaders de l’organisme depuis 2013.
« Mon travail auprès de CARE Jeunesse m’a donné une occasion unique de collaborer, au-delà de mon programme de recherche, avec d’anciens jeunes pris en charge dans le but d’améliorer les conditions des jeunes pris en charge sur le terrain », explique la chercheuse.
Elle ajoute que sa mise en nomination pour le prix national Lynn Factor Stand Up for Kids l’a inspirée à travailler encore plus fort à défendre les droits des jeunes, non seulement au Québec, mais aussi à l’échelle fédérale et internationale.
« J’ai le grand privilège de représenter le Canada au sein de l’International Research Network on Transitions to Adulthood from Care, un consortium mondial de chercheuses et de chercheurs », mentionne Varda Mann-Feder.
« J’y consacre beaucoup d’énergie à mener des travaux comparatifs ainsi qu’à inciter mes collègues du monde entier à aller au-delà des recherches et des publications pour s’impliquer dans la défense des droits et le soutien actif auprès des responsables des politiques et des praticiens. »