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« Lorsqu’on admet la présence des femmes dans les sports, on ne peut plus l’ignorer ailleurs. »

Six mois après son incarcération en Iran, la professeure de l’Université Concordia lance un livre sur les musulmanes qui négocient la reconnaissance des droits de la personne sur les terrains de sport
March 17, 2017
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By Christian Durand



C’est bien connu, la pratique d’un sport est un excellent moyen de garder la forme. Et toute personne qui a déjà assisté à un match important vous dira que le sport rapproche les gens.

Mais peut-il servir à la résistance politique? Pour bien des femmes vivant dans le monde musulman, la réponse est oui.

Le mercredi 22 mars, Homa Hoodfar, professeure à l’Université Concordia, lancera officiellement son tout dernier ouvrage : Women’s Sport as Politics in Muslim Contexts (« le sport féminin en tant qu’action politique dans les contextes musulmans »).

Le livre a été publié à Londres en 2015 par Femmes sous lois musulmanes, un organisme caritatif œuvrant à la promotion de l’égalité des femmes, de la justice en matière de genre et des droits de la personne. Mais la Pre Hoodfar, qui est attachée à l’Institut Simone-De Beauvoir de la Faculté des arts et des sciences de Concordia, a été forcée d’en reporter le lancement canadien.

En effet, l’an dernier, Mme Hoodfar a été détenue durant 112 jours à la prison d’Evin, en Iran. Son incarcération sanctionnait prétendument des « activités féministes » liées à ses travaux de recherche.

Dans Women’s Sport as Politics in Muslim Contexts, la Pre Hoodfar et d’autres érudites traitent de la bravoure et de la créativité que manifestent les athlètes musulmanes. En effet, la sphère sportive est un haut lieu de la contestation opposant activistes des droits de la femme et forces politiques islamistes.

Le livre propose une analyse novatrice de la situation du genre et du sport dans différents contextes musulmans, entre autres en Iran, en Arabie saoudite, en Turquie, au Bangladesh, en Europe, en Amérique du Nord et au Sénégal. Il s’intéresse aux femmes qui renégocient les frontières politiques et idéologiques et qui politisent et perturbent des espaces associés au sport afin de revendiquer l’équité entre les sexes et de redéfinir le rôle social de la femme.
 

Photo by Asian Media (Flickr CC)


« Le changement social peut s’amorcer partout, notamment sur les terrains de sport. »

Pourquoi le sport offre-t-il un cadre aussi intéressant à la recherche sur l’égalité entre les sexes dans le contexte musulman?

Homa Hoodfar : En matière d’égalité entre les sexes, les femmes ont tendance à se confiner aux changements d’ordre légal. Si les lois ne sont pas discriminatoires à leur égard, elles tiennent pour acquis que tout va bien. Mais si vous creusez la question, vous constaterez que ce n’est pas le cas. Le changement social peut s’amorcer partout, notamment sur les terrains de sport – qui ne sont pourtant pas des lieux d’expression politique traditionnels.

Le livre examine diverses stratégies raffinées, ciblées et constamment évolutives de la résistance féminine à l’exclusion des femmes des milieux sportifs. La revendication d’une citoyenneté à part entière et égalitaire s’inscrit dans la lutte pour l’inclusion des femmes en tant qu’athlètes et spectatrices.

Parlez-nous des stratégies qu’emploient les femmes pour obtenir l’égalité.

H. H. : Prenez l’Iran, où le port du voile est obligatoire. C’est un stratagème pour exclure les femmes du domaine public. Mais les Iraniennes soutiennent que rien dans le Coran ne les prive de faire du sport. Dès lors, elles font pression sur le gouvernement pour qu’il leur accorde le droit de participer ou d’assister, dûment voilées, à des activités sportives. Si elles reçoivent l’aval des autorités, elles pourront exiger le financement des programmes de sport destinés aux femmes. Elles ont appris à revendiquer leur juste part des choses sans toutefois remettre en question l’idéologie religieuse. Dans ces pays, c’est une méthode très fructueuse pour combattre la discrimination.

Comment envisagez-vous l’avenir du sport et de la politique dans cette partie du monde?

H. H. : La création des jeux olympiques musulmans, auxquels participent des athlètes en hijab, a fourni de nombreuses possibilités aux sportives d’élite. De plus, l’événement a obtenu une visibilité mondiale.

Des organisations internationales, la FIFA notamment, acceptent maintenant que leurs membres féminins portent le voile ou un couvre-chef du genre. Cela prouve que l’association de l’Islam, du sport et de la femme n’a rien d’illogique. Une telle officialisation permet de poser un regard neuf sur les musulmanes. En outre, elle sert de moyen de pression auprès des gouvernements.

Lorsqu’on prend conscience de la présence des femmes dans le domaine sportif, on ne peut plus nier leur existence dans les universités, le monde du travail ou d’autres espaces publics.

Assistez au lancement officiel du livre Women’s Sport as Politics in Muslim Contexts 
le mercredi 22 mars à 17 h, à la salle LB 361 du pavillon John-W.-McConnell 
(1400, boulevard De Maisonneuve Ouest).

 



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