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Selon une nouvelle étude, les fictions historiques apprennent plus que de simples faits et dates aux enfants

Les romans se déroulant dans le passé apporteraient aux élèves autant de connaissances que les manuels scolaires et favoriseraient en outre leur développement socioaffectif, notamment sur le plan de l’empathie et de la perception.
6 avril 2023
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Sandra Martin-Chang portant une veste blanche à l'intérieur
« L’empathie historique amène les élèves à réfléchir au quotidien des protagonistes d’un roman et à l’incidence des événements sur leur vie. Les jeunes lectrices et lecteurs se trouvent alors transportés dans un autre univers », selon Sandra Martin-Chang.

Traditionnellement, l’enseignement de l’histoire au primaire ne suscite pas de questionnement et s’accommode d’une abondance de noms, de dates et de faits à retenir. Pourtant, comme le démontrent deux chercheuses de l’Université Concordia dans un nouvel article paru dans la revue The Reading Teacher, les élèves apprennent tout autant en lisant un roman historique de qualité qu’en consultant un bon manuel scolaire. De plus, la première activité stimule le développement socioaffectif de certains d’entre eux.

Les chercheuses le soulignent d’entrée de jeu : si le rapport entre la lecture d’œuvres de fiction et le renforcement de la capacité d’empathie chez les jeunes lectrices et lecteurs est bien connu, ses retombées sur leur familiarisation avec le monde soulèvent encore des questions – surtout lorsque cet apprentissage a lieu dans le cadre scolaire.

Ainsi, les chercheuses ont constaté que les élèves acquièrent la même somme de connaissances sur une période précise de l’histoire quand on leur lit à haute voix des extraits d’ouvrages choisis, peu importe qu’il s’agisse de fiction ou de non-fiction. Elles apportent toutefois la nuance suivante : les enfants exposés à des œuvres d’imagination se distinguent par une plus grande empathie pour les personnages et une capacité accrue à appréhender le monde de leur point de vue.

« Dans un cadre d’enseignement transversal, il importe de donner vie à l’histoire au moyen de la fiction », affirme Sandra Martin-Chang, coauteure de l’article et professeure au Département des sciences de l’éducation de Concordia. « L’empathie historique amène les élèves à réfléchir au quotidien des protagonistes d’un roman et à l’incidence des événements sur leur vie. Les jeunes lectrices et lecteurs se trouvent alors transportés dans un autre univers. »

L’étude a été élaborée et menée par Meredyth Dwyer (M.A. 2019), qui prépare une maîtrise ès arts en psychologie du counseling à l’Université Yorkville et occupe parallèlement la fonction de conseillère auprès des jeunes en Ontario.

La Grande Dépression de A à Z

Pour les besoins de l’étude, 41 élèves âgés de 9 à 12 ont été séparés en deux groupes, semblables quant au nombre d’enfants les composant et à la parité filles-garçons. À l’un des groupes, Meredyth Dwyer a lu à haute voix trois extraits de Bud, Not Buddy, un roman situé pendant la Grande Dépression. Afin de s’assurer de fournir à son auditoire la même information factuelle contenue dans l’ouvrage de non-fiction, elle a incorporé des faits additionnels à certains passages de l’histoire. À l’autre groupe, elle a lu des extraits de What Was the Great Depression?, un manuel didactique destiné aux élèves de la troisième à la septième année du primaire et expliquant le contexte de la Grande Dépression dans un vocabulaire approprié à leur âge.

La lecture à haute voix a permis à Meredyth Dwyer de mieux prendre en compte les différents degrés d’aptitude à la lecture des enfants et le niveau d’accessibilité des textes pour eux. Quatre séances de lecture de 25 minutes chacune ont eu lieu au cours d’une même semaine.

Par la suite, les élèves ont rempli une série de questionnaires visant à évaluer leur empathie pour les personnages, leur volonté à leur venir en aide, leur appréciation globale de l’activité ainsi que leur impression de « transportement » – le fait d’être transporté par une histoire et entraîné dans un autre lieu, à une autre époque. Entre la première et la quatrième et dernière séance de lecture, les enfants ont par ailleurs été soumis à des minitests sur leur connaissance de la Grande Dépression.

Les élèves du groupe associé à l’œuvre de fiction ont rapporté que plus ils se sentaient transportés par le roman, plus ils s’impliquaient dans le récit imaginaire, plus ils étaient aptes à adopter le point de vue des personnages et plus ils voulaient leur venir en aide. Ils ont aussi affirmé avoir éprouvé un vif plaisir à ce qu’on leur fasse la lecture. Les enfants de l’autre groupe – à qui on avait lu des extraits d’un ouvrage de non-fiction – ont établi un lien entre le « transportement », l’appréciation globale de l’activité et les éléments relevant de l’imaginaire, mais n’ont pas fait de rapprochement avec quelque compétence socioaffective que ce soit. Enfin, les membres des deux groupes ont dit que les séances de lecture leur avaient apporté de nouvelles connaissances sur la Grande Dépression.

Le savoir-être au service de l’apprentissage

« Nos résultats indiquent que les élèves ont intégré autant de données factuelles à partir des extraits du roman que de ceux de l’ouvrage de non-fiction, explique la Pre Martin-Chang. En revanche, les enfants à qui on a fait la lecture de la fiction historique ont manifesté une plus grande capacité d’empathie, se sont plus identifiés aux personnages principaux et ont davantage voulu leur venir en aide. »

À son avis, même si l’étude s’appuie sur un échantillon relativement restreint, elle n’en recèle pas moins un potentiel pédagogique.

« Cette approche est prête à être utilisée auprès des groupes-classes, poursuit-elle. Des enseignantes et enseignants de diverses matières pourraient collaborer au développement d’un apprentissage transdisciplinaire. Sur le plan de la synergie, il y a beaucoup d’espace que nous n’occupons peut-être pas. Comme le souligne Meredyth Dwyer, tout en conservant le même niveau d’apprentissage factuel, nous devrions chercher à faire valoir les compétences de “savoir-être”, notamment la capacité à s’identifier à autrui, et ce, dans le plus grand nombre de groupes-classes possible. »

Lisez l’article cité (en anglais) : Fact from Fiction: The Learning Benefits of Listening to Historical Fiction.



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