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Un atelier de l’Université Concordia explore les incidences de la recherche sur les communautés autochtones ainsi que les changements qui doivent être apportés

Les membres des communautés en appellent à des collaborations et à des partenariats plus équitables avec les institutions et le milieu de la recherche
20 novembre 2024
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Les peuples autochtones font l’objet de recherches depuis que les Européens ont posé le pied dans les Amériques. Et les incidences de ces recherches ne leur ont pas toujours été favorables.

Le 15 novembre dernier, les directions autochtones de l’Université Concordia ont offert un atelier intitulé « Perspectives autochtones sur la conduite éthique de la recherche » en vue d’explorer les conséquences, pour les peuples autochtones, d’avoir été « observés à mort » – pour reprendre les mots d’un aîné – et de déterminer les changements qui doivent être apportés afin d’établir des relations plus conformes à l’éthique avec les communautés autochtones en matière de recherche.

L’atelier s’inscrit dans le cadre de la série d’activités d’apprentissage autochtone Pîkiskwêtân. Cette série, dont le nom signifie « parlons-nous » en langue Nêhiyawêwin (crie), s’adresse à tous les membres de la communauté de Concordia qui souhaitent améliorer leurs compétences culturelles et acquérir les connaissances nécessaires pour travailler de manière efficace avec les communautés autochtones et offrir des services et des programmes culturellement sûrs aux étudiantes et étudiants autochtones. 

L’atelier était animé par Manon Tremblay, directrice principale des directions autochtones et nêhiyaw iskwêw (Crie des plaines) membre de la Nation crie de Muskeg Lake. Avant de rejoindre Concordia, Manon Tremblay a occupé le poste de directrice de la recherche autochtone au sein du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), où elle a pris part au projet d’engagement qui a mené à l’élaboration du plan stratégique des trois organismes subventionnaires intitulé Établir de nouvelles orientations à l’appui de la recherche et de la formation en recherche autochtone au Canada.

Manon Tremblay décrit les relations entre les communautés autochtones et le milieu de la recherche qui ont prévalu au fil de l’histoire et fait état des changements souhaités par ces communautés pour les années à venir.

Pouvez-vous expliquer pourquoi vous avez jugé cet atelier nécessaire?

Manon Tremblay (MT) : Avant mon entrée en poste à Concordia, j’ai dirigé un processus participatif de 18 mois pour le compte des trois organismes subventionnaires avec les communautés des Premières Nations, des Métis et des Inuits dans toutes les régions du Canada. Nous avons écouté les témoignages de milliers d’Autochtones sur la question de la recherche, et constaté que des thèmes communs se dégageaient de l’expérience des peuples autochtones en cette matière.

L’un de ces thèmes communs était la recherche « parachutée ». Il s’agit d’une pratique qui consiste, pour des équipes de recherche, à débarquer dans une communauté sans préavis ni consentement préalable. Personne ne sait qui ces chercheurs sont, sur quoi porte leur recherche ni combien de temps ils comptent rester. Ce que les membres des communautés savent, en revanche, c’est qu’une fois les chercheurs partis, ils ne les reverront probablement jamais, pas plus qu’ils ne connaîtront les résultats de leurs travaux.

Comment les communautés autochtones souhaitent-elles que la recherche soit effectuée à l’avenir?

MT : Les populations autochtones sont fatiguées des projets de recherche dont les priorités sont principalement motivées par les intérêts des chercheurs et qui ne répondent pas aux besoins des communautés. Elles aimeraient prendre part à des partenariats plus équitables où la recherche servirait les intérêts de toutes les parties. Nous voulons participer activement au processus de recherche.

Nous aimerions que les équipes de recherche préparent le terrain avant d’arriver dans nos communautés. Pour établir des relations mutuellement bénéfiques à long terme, il est impératif de tisser des liens avec les dirigeants et les aînés de la communauté avant le début de la recherche et d’écouter réellement les orientations et les conseils qu’ils ont à offrir. Il est également important de maintenir ces liens pendant la recherche et après sa conclusion.

Un autre thème commun est apparu : la nécessité de faire participer les membres de la communauté à la recherche dans le respect des modes de connaissance autochtones. En tant qu’Autochtones, nous voulons savoir ce qui se passe. Si nous en avons la possibilité, nous aimerions également pouvoir apporter notre contribution, mais de manière significative, et non pas de manière symbolique ou performative.

Nous voulons que les chercheurs prennent le temps d’expliquer ce qu’ils font en termes simples. Nous voulons qu’ils prennent le temps de visiter les écoles et de parler aux enfants de leur travail. Qui sait ? Peut-être ces échanges inciteront-ils un enfant à envisager une carrière scientifique.

Nous voulons des chercheurs qui s’investissent dans la communauté et qui souhaitent établir une relation de recherche à long terme.

Y a-t-il une chose en particulier que vous aimeriez que les gens retiennent de cet atelier?

MT : Les chercheurs doivent réfléchir à ce que signifie pour les populations autochtones le fait d’avoir été l’objet de recherches pendant la majeure partie des 150 dernières années.

Partout où je suis allée au Canada, j’ai entendu les aînés dire : « Nous avons été observés à mort, et je n’ai pas encore vu les résultats de ces recherches ». Un autre aîné a déclaré : « J’ai fait l’objet de recherches toute ma vie, et je n’ai jamais trop su de quoi il s’agissait. »

Il importe également que les chercheurs réfléchissent à l’espace qu’ils occupent lorsqu’ils se trouvent dans l’une de nos communautés. Leur seule présence est susceptible de perturber la vie quotidienne de nombreuses personnes et la réponse à leurs besoins personnels et professionnels peut être éprouvante pour la communauté. Nos aînés sont énormément sollicités pour des entretiens et de tâches performatives. Il serait bon de discuter de ces questions à l’avance avec les dirigeants et les aînés.


Améliorez vos compétences culturelles et acquerrez des connaissances qui vous permettront de travailler de manière efficace avec les membres des communautés autochtones en vous inscrivant à la
série d’activités d’apprentissage autochtone Pîkiskwêtân, offerte à l’Université Concordia.

 



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