Honorary degree citation - Fernand Seguin*
By: Michel Despland, June 1979
Monsieur le Chancelier, j'ai l'honneur de vous présenter Monsieur Fernand Seguin.
Monsieur Seguin est né à Montréal sur la rue Saint André. Son père était ouvrier électricien et l'on bricolait beaucoup dans la famille. Mais le petit Fernand, sixième de sept enfants, partit plutôt vers les livres. Il avait de la chance: tout près de chez lui, en face du Parc Lafontaine, il découvrit un bâtiment monumental, avec d'imposantes colonnes, la Bibliothèque municipale de Montréal. Il y trouva des encyclopédies; il lut tout. On lui montra les classiques littéraires canadiens. Il lut ça aussi. Mais c'est la science qui semblait le mieux combler son appétit vorace. L'école publique réussit à le mener à l'université; ce n'était pas souvent le cas alors; et il fallut une bourse, obtenue par une voie qui tenait plus à la chance qu'à une politique sagement planifiée. La Faculté des Sciences de l'Université de Montréal l'amène en 1945 à une maîtrise en biologie. Et c'est le début d'une carrière de chercheur dans le domaine bio-médical, interrompue en 1952 par une histoire de coupure de subvention: le ministère interrompt des recherches qui marchent au nom de critères purement "objectifs" et bureaucratiques.
Fort heureusement Monsieur Seguin avait commencé en 1947 une activité d'enseignement au Radio-Collège. Dès 1952 Radio-Canada l'invite à entreprendre une série d'émissions télévisées visant à rendre l'information scientifique accessible au grand public d'expression française. L'enthousiasme, la foi, le talent, présidaient à cette entreprise. Elle continua, se renouvela et continue encore et se renouvelle encore. En 1967 le plus grand hommage qui soit lui a été rendu: 80% des étudiants de la Faculté des Sciences déclaraient avoir choisi cette voie après avoir mordu aux émissions de Fernand Seguin. Radio-Canada et Fernand Seguin ensemble ont transmis la passion pour la science à toute une génération de Québécois, contribuant ainsi à une transformation en profondeur de la vie intellectuelle de ce pays. L'UNESCO n'a fait que tirer la conclusion qui s'imposait en lui attribuant l'automne dernier le prix Kalinga, prix mondial décerné pour oeuvre exceptionnelle de vulgarisation scientifique. Nulle part au monde un effort aussi soutenu, reposant sur l'engagement d'un seul homme, a poursuivi une tâche aussi vaste et obtenu des résultats aussi insignes.
Mais revenons chez nous. Monsieur Seguin, vous avez toujours cherché à transmettre le désir d'en savoir davantage et vous avez toujours découvert que ce désir se communique fort bien à ceux qui au départ ne savent pas grand chose. Vous êtes un vulgarisateur scientifique, un éducateur populaire. Nous aimons croire que le plus profond de votre coeur obéit à une vocation comparable à celle qui anime cette université dans ses meilleurs moments. Vous savez aussi faire preuve d'humour. Passant en revue votre carrière scolaire, vous avez déclaré que sur la cinquantaine de professeurs qui vous ont enseigné, il y en a eu cinq de bons. Avec un réalisme gentil et de bon aloi, vous avez ajouté qu'il n'en faut pas plus pour bien orienter un élève. Voilà une lucidité et une confiance dans les ressources de l'élève qui vous rend bien sympathique à notre groupe d'éducateurs.
Monsieur le chancelier, c’est un grand honneur pour moi: au nom du Sénat et avec l’autorité du bureau des gouverneurs, je vous présente Fernand Seguin pour que vous lui confériez le grade de Docteur es Science, honoris causa.
* deceased